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Le domaine Dale, à Brampton

Cérémonie de dévoilement de la plaque provinciale commémorant le domaine Dale, à Brampton

Thomas H.B. Symons, C.C., O.Ont, FRSC, LL.D., D.Litt., D.U., D.Cn.L., FRGS, KSS – Président, Fiducie du patrimoine ontarien

En tant que président de la Fiducie du patrimoine ontarien, moi dont la famille est originaire du comté de Peel, ce qui fait ma fierté, je suis ravi d’être parmi vous ce matin pour participer à cette cérémonie spéciale de commémoration du domaine Dale.

Beth vous a fourni des renseignements généraux sur la Fiducie du patrimoine ontarien, mais j’aimerais prendre quelques minutes pour décrire notre action plus en detail.

La Fiducie est chargée de recenser, de préserver, de protéger et de promouvoir le patrimoine culturel et naturel dans toute la province. Cette mission importante est menée à bien en conservant des propriétés du patrimoine culturel et naturel, des objets archéologiques et des collections historiques.

Toutefois, comme Beth vous l’a expliqué, les activités de la Fiducie ne se cantonnent pas à la préservation : en tant que centre actif d’information et d’éducation sur le patrimoine, la Fiducie élabore et met en œuvre des programmes qui mobilisent des personnes de tous âges et de tous milieux pour reconnaître et célébrer le patrimoine riche et diversifié de notre province.

Grâce aux plus de 1 200 plaques provinciales érigées partout en Ontario, la Fiducie nous informe en nous rappelant notre passé ainsi qu’en nous aidant à le comprendre, à faire le lien avec le présent et à s’y référer pour aborder l’avenir.

Quinze de ces plaques bleues et or caractéristiques ont été installées dans la région de Peel. Je ne vous en citerai que quelques exemples, parmi d’autres qui commémorent et célèbrent des personnes, des lieux et des événements remarquables :

  • le palais de justice du comté de Peel (qui est protégé par une servitude de conservation de la Fiducie);
  • la fondation de Brampton;
  • le peintre de renommée internationale, J.W.L. Forster.

En 2007, j’ai eu l’immense honneur de dévoiler une plaque dédiée à l’historien du comté de Peel, M. William Perkins Bull, mon grand-père. Je m’empresse de préciser que je n’occupais pas le poste de président de la Fiducie lorsque la décision a été prise d’ériger une plaque en son honneur. Je l’ai seulement dévoilée.

La plaque que nous dévoilons aujourd’hui commémore le domaine Dale et son importance dans l’expansion de Brampton – « le centre canadien de la floriculture ». L’histoire du domaine Dale est aussi extraordinaire que commune.

L’entreprise a connu un succès international sans pareil et unique, mais son histoire rappelle celle d’un grand nombre de nos ancêtres qui ont émigré vers leur nouvelle terre d’accueil et qui, à force de travail acharné, de coopération familiale et communautaire et d’innovation, ont fini par développer une activité florissante qui a profité à l’ensemble de la collectivité.

C’est également la trajectoire que les néo-Canadiennes et néo-Canadiens continuent de suivre aujourd’hui partout dans le pays.

Edward Dale arrive à Brampton avec sa jeune famille en 1863, en provenance d’Angleterre, où il exerçait le métier d’ouvrier maraîcher dans des conditions économiques difficiles. Espérant mener une vie meilleure au Canada, il décide de s’installer à Brampton, ayant peut-être entendu que la plaine de Peel environnante contient quelques-unes des terres agricoles les plus riches du pays.

J’aimerais profiter de l’occasion pour souligner l’incroyable richesse du patrimoine agricole et rural de Brampton. La protection des zones vertes demeure à la fois une priorité clé et un défi permanent, compte tenu de l’élargissement du périmètre urbain.

Au cours de la dernière décennie, les membres du conseil, du personnel de planification de la conservation du patrimoine et du Brampton Heritage Board ont travaillé de concert pour recenser, évaluer et préserver les exploitations agricoles et les paysages du patrimoine culturel.

La ville a adopté une série d’outils de conservation du patrimoine pour protéger ces ressources. Malgré certaines pertes, des progrès importants ont également été réalisés – et ce travail essentiel se poursuit.

Lorsque la famille Dale arrive à Brampton, le village est en passe de devenir une ville. Vingt-cinq and plus tôt, la colonie ne comptait qu’une centaine d’habitants, mais ils étaient au nombre de 1 200 en 1863. Grâce au poste de télégraphe et à la gare de chemin de fer du Grand Tronc nouvellement construits, Brampton est relié à Toronto ainsi qu’aux collectivités et aux marchés de toute la province et du continent.

Pendant leurs six premières années à Brampton, les Dale louent des terres et Edward s’attelle à créer une exploitation maraîchère. Son fils aîné, Harry, ne tarde pas à travailler à ses côtés.

Les deux hommes font du porte-à-porte pour vendre leurs légumes et la croissance de leur activité va de pair avec celle de la ville. Il faut peu de temps à l’entreprise pour dépasser largement les frontières de Brampton, les légumes de la famille Dale étant transportés par train jusqu’au marché de Toronto.

En 1869, les Dale font l’acquisition de leur premier terrain – une parcelle de 3,25 acres située à l’angle nord-est des rues Main et Vodden – et élargissent leur production de légumes en cultivant du céleri, des radis et de la laitue. Comme ces légumes doivent être cultivés en serre chaude, les Dale construisent leur première serre.

Dans les années 1870, Harry s’intéresse aux roses et expérimente des techniques permettant de produire des roses magnifiques et résistantes de taille et de couleur uniformes.

Selon la légende, Harry Dale, qui est alors un beau jeune homme, fait du porte-à-porte pour vendre ses légumes aux maîtresses de maison en leur offrant une rose. Sans surprise, les affaires vont bon train.

Edward part à la retraite en 1882 et Harry reprend les rennes de l’entreprise, en concentrant ses activités principalement sur la production de fleurs. La passion de Harry pour les roses est totale et, grâce à son énergie et à sa vision novatrice, l’activité de production de roses connaît une croissance exponentielle.

Dans les années 1890, l’entreprise est devenue si grande que Harry n’est plus en mesure de gérer à la fois les activités de production de fleurs et les finances de la compagnie. Un gentilhomme du nom de T.W. Duggan est recruté pour gérer les finances et il se montre tout aussi dévoué à l’entreprise que Harry.

Entre 1896 et 1900, la famille Dale agrandit ses installations : le nombre de serres passe de 8 à 20, et la surface des cultures sous verre passe de près de 20 000 mètres carrés (65 000 pieds carrés) à plus de 45 000 mètres carrés (150 000 pieds carrés ou 11 acres). La compagnie est connue dans le monde entier pour sa « rose du Canada ».

Malheureusement, Harry Dale décède subitement en 1900 et laisse derrière lui le plus grand complexe de serres en Amérique du Nord. Ses amis et sa famille pleurent la perte d’un être cher mais se consolent en constatant qu’il a réalisé son rêve.

Harry a produit certaines des plus belles roses du monde et son dévouement et son ingéniosité sont devenues légendaires. La réputation du domaine est telle au tournant du XXe siècle qu’il reçoit la visite largement publicisée du duc et de la duchesse d’York, les futurs roi George V et reine Mary, en 1901.

À la mort de Harry, T.W. Duggan prend la direction de la compagnie et le domaine Dale continue d’élargir ses activités et de mettre au point de nouvelles variétés de roses magnifiques. Au début de la Première Guerre mondiale, le domaine Dale fait partie des plus grands producteurs de fleurs en serre au monde.

Dans les années 1920, la production de fleurs coupées du domaine Dale atteint près de la moitié de la production canadienne. L’entreprise emploie plus de 350 personnes – ce qui en fait le plus gros employeur à Brampton – et commercialise 30 variétés différentes de fleurs, notamment 18 variétés de roses primes.

Le succès du domaine Dale a inspiré d’autres producteurs de fleurs et, dans les années 1920, les exploitations pratiquant la culture en serre sont nombreuses à Brampton – même si le domaine Dale reste de loin la plus importante. La ville est alors en passe de devenir le « centre canadien de la floriculture ».

Le domaine Dale parvient à maintenir ses activités pendant les pires années de la Grande Crise. À vrai dire, durant l’une de ces années, alors que les emplois sont rares et que de nombreuses personnes se retrouvent dans le besoin, plus de 1 000 noms apparaissent sur les registres du domaine Dale – ce qui fait de l’entreprise un employeur extrêmement important pendant cette période difficile.

En 1934, l’entreprise lance sa fameuse technique de la « rose autographiée », qui consiste à perforer le nom « Dale » dans une feuille de chacune de ses plus belles roses. La rose autographiée Dale acquiert une renommée mondiale en remportant des prix importants lors de plusieurs salons internationaux d’art floral.

Au cours des décennies suivantes, le domaine Dale continue de produire des fleurs d’excellente qualité et en grande quantité. Les roses sont la spécialité de l’entreprise, mais elle produit également des orchidées, des œillets, des jonquilles, des lis, des gueules-de-loup, des hortensias et des poinsettias – pour ne citer que quelques-unes des nombreuses variétés cultivées. En 1956, l’entreprise atteint un pic avec une production annuelle de 20 millions de fleurs coupées – dont la moitié sont des roses. La contribution du domaine Dale à l’industrie de la floriculture est considérable aux plans artistique et scientifique.

Toutefois, les années 1960 et 1970 sont difficiles pour l’industrie de la floriculture à Brampton, dans la mesure où les coûts liés à la modernisation et à l’entretien des serres deviennent un enjeu essentiel. En raison de la hausse des prix du pétrole et de l’évolution des goûts des consommateurs, le domaine Dale est contraint de réduire ses activités jusqu’à la fermeture définitive de l’entreprise en 1980.

Pour plusieurs générations, la cheminée Dale, d’une hauteur de 300 pieds, est la principale curiosité de Brampton. Dans toute la ville, on peut entendre clairement le sifflet de la compagnie qui ponctue le début, le milieu et la fin de la journée de travail. Les vastes serres (dont 140 sont finalement construites) s’étalent des deux côtés de la rue Main et occupent la majeure partie du secteur nord de la ville.

Le succès international de la compagnie est une source d’inspiration pour les autres entreprises locales. Les producteurs du monde entier s’inspirent des innovations du domaine Dale, dont les fleurs colorées ont égayé d’innombrables foyers partout en Ontario, au Canada et à l’étranger durant plus d’un siècle. Le produit phare du domaine Dale, la rose, est devenu le symbole de la ville elle-même et, aujourd’hui encore, la rose continue de symboliser le dévouement des travailleurs de Brampton, la croissance et les innovations de la localité, ainsi que son patrimoine riche et coloré.

Je vous remercie.