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La conférence de l'Ontario Land Trust Alliance

Élargir les horizons : Discours à l’occasion de la séance plénière d’ouverture de la conférence de l’Ontario Land Trust Alliance

Thomas H.B. Symons, C.C., O.Ont, FRSC, LL.D., D.Litt., D.U., D.Cn.L., FRGS, KSS – Président, Fiducie du patrimoine ontarien

Je suis ravi d’être parmi vous ce matin pour présenter mes salutations aux participants à la conférence au nom du conseil d’administration de la Fiducie du patrimoine ontarien.

C’est également un plaisir d’être entouré de personnes qui considèrent, comme nous, qu’il est important de préserver le patrimoine riche et diversifié de l’Ontario, et dont l’action concrète en la matière revêt différentes forms.

Je suis également ravi d’accueillir la conférence à Peterborough, où je réside depuis que je m’y suis installé en tant que président fondateur de l’Université Trent il y a près de 50 ans. Peterborough est une collectivité dynamique et stimulante et je n’ai pas vu le temps passer. La richesse de son patrimoine naturel, culturel et architectural en fait un lieu tout à fait approprié pour aborder le thème choisi pour votre conférence : « Élargir les horizons ».

Dans le cadre de ses efforts de conservation, de protection et de promotion de ses ressources historiques, Peterborough a joué un rôle essentiel en matière d’intendance du patrimoine et noué des relations de travail étroites avec la Fiducie du patrimoine ontarien. La ville a aussi commencé à reconnaître que le patrimoine, les arts et la culture ne constituent pas des entités distinctes, mais qu’ils sont interdépendants, comme les récentes célébrations organisées dans le cadre de Portes ouvertes Ontario et de la Fête de la culture l’ont prouvé.

Les citoyens et les responsables locaux de toute la province, et à vrai dire du pays dans son ensemble, reconnaissent également la nature intégrée du patrimoine, des arts et de la culture, dans la mesure où ils s’appuient sur ces forces créatrices pour stimuler l’économie, favoriser l’innovation et améliorer la qualité de vie au sein de leurs collectivités.

Les personnes qui travaillent de concert pour préserver et prendre soin des espaces naturels de notre province ont un rôle important à jouer dans ce processus. Comme le programme complet et stimulant de cette conférence le met en lumière, la préservation du patrimoine est une entreprise interdisciplinaire. Les meilleurs résultats sont obtenus lorsque des personnes provenant d’horizons divers s’associent pour défendre une cause commune. La variété des biographies des conférenciers illustre le large éventail de compétences et d’expertise qui est nécessaire dans le cadre du projet d’acquisition et de conservation des terres, compte tenu de ses implications environnementales, économiques, juridiques et politiques.

Je suis persuadé que cette conférence offrira une tribune de discussion formidable pour vous permettre, durant cette fin de semaine, d’apprendre les uns des autres, de débattre ensemble des défis et des aspects gratifiants associés à votre action, ainsi que d’élaborer et d’étoffer vos stratégies pour l’avenir.

Le programme de la conférence offre aussi certaines possibilités particulièrement intéressantes pour découvrir le patrimoine architectural, culturel et naturel de la région de Peterborough et les liens concrets qu’il entretient avec les paysages variés de ce territoire.

Il suffit de s’aventurer à une centaine de pieds d’ici pour découvrir l’une des caractéristiques patrimoniales les plus importantes de la ville, la rivière Otonabee. En réalité, il se peut que Samuel de Champlain lui-même soit passé par cette voie navigable, derrière l’Holiday Inn, durant le périple qui l’a mené vers le Sud, depuis la Huronie, avec ses alliés autochtones, en 1615. Dans moins de cinq ans, les festivités célébrant l’incroyable voyage qui lui a permis de découvrir et d’explorer le cœur de l’Ontario nous rappelleront à toutes et à tous le rôle et l’importance de la grande voie navigable Trent-Severn dans l’histoire du Canada. Les besoins et le potentiel de cette voie navigable aux plans patrimonial, historique, éducatif, social et culturel sont immenses. Ceci nous rappelle constamment qu’il est nécessaire d’adopter des stratégies collaboratives et novatrices pour préserver et mettre en valeur les ressources patrimoniales de l’Ontario avant qu’il ne soit trop tard. Une course contre la montre s’est engagée aux quatre coins de l’Ontario. Chaque jour, des sites naturels importants sont détériorés et des bâtiments patrimoniaux sont détruits. Nous devons de toute urgence avancer sur ces sujets.

Pour en revenir à votre programme, je note que vous organisez, plus tard cet après-midi, une promenade patrimoniale à la découverte de certains des lieux historiques de Peterborough. J’espère que vous apprécierez d’en apprendre plus sur le patrimoine de la ville, qui comprend plus de 100 propriétés désignées aux termes de l’article 29 de la Loi sur le patrimoine de l’Ontario. La ville compte également deux propriétés protégées par une servitude de la Fiducie du patrimoine ontarien – la St. John’s Anglican Church, construite en 1834, et la gare du CFCP de Peterborough, qui date de 1884 – ainsi que dix plaques provinciales et trois lieux historiques nationaux. Je suis ravi que la visite s’achève par le Musée canadien du canot, qui est lui-même devenu un symbole du patrimoine canadien. L’édifice abrite des pièces d’une valeur inestimable, mais le fait que cette ressource nationale aussi importante que singulière doive lutter pour se maintenir à flot nous prouve qu’il y a beaucoup à faire pour que les Canadiennes et Canadiens prennent conscience de leur patrimoine.

L’atelier organisé cet après-midi dans les plaines du lac Rice constitue également une occasion formidable de se renseigner sur le patrimoine naturel important de la région et sur les liens qu’il entretient avec certaines caractéristiques essentielles du patrimoine culturel qui l’ont influencé. Le paysage présente non seulement des caractéristiques du patrimoine naturel singulières, comme la savane à chênes noirs d’Alderville, mais il symbolise aussi la continuité des liens tissés avec les membres des Premières Nations dans cette région et de leurs contributions.

L’organisation de votre conférence sous forme d’ateliers montre par ailleurs comment divers partenaires peuvent se regrouper dans un esprit de coopération pour chercher à atteindre un objectif patrimonial commun, sous l’égide, dans ce cas précis, de la Rice Lake Plains Joint Initiative. J’ai cru comprendre que l’initiative a célébré son septième anniversaire plus tôt ce mois-ci. Les participants doivent être félicités pour leurs efforts continus visant à préserver les caractéristiques patrimoniales importantes de ce paysage varié. Leurs publications et les manifestations qu’ils organisent montrent combien leurs initiatives et leurs efforts en matière d’éducation publique et d’engagement sont vastes.

Par ailleurs, je note avec intérêt que vous organisez demain un atelier sur le terrain, à la pointe Young. Votre itinéraire passant par l’écluse de la pointe Young, le Dance Nature Sanctuary et la zone de protection de la nature de la pointe Young semble tout à fait exhaustif et illustre, une nouvelle fois, l’importance des relations entre le patrimoine naturel, culturel et architectural qui caractérisent les paysages de tout l’Ontario.

En tant que président de la Fiducie du patrimoine ontarien, je me réjouis que notre organisme détienne une servitude protectrice du patrimoine pour conserver Leidra Lodge, un chalet de vacances datant des années 1920, ainsi que la propriété de 78 acres adjacente aux terrains détenus par Otonabee Conservation. La propriétaire de ces biens, Mme June Ardiel, en a fait don à la Fiducie, respectivement en 2004 et 2007.

La propriété de 78 acres, qui jouxte la zone de protection de la nature de la pointe Young, comprend une partie d’une forêt de pins blancs vieille d’environ un siècle qui a été utilisée par le ministère des Richesses naturelles pour produire du matériel de pépinière et en tant que banque de semences. Je suis ravi que la Fiducie ait la chance d’assurer à perpétuité l’intendance des propriétés patrimoniales de Mme June Ardiel à la pointe Young.

Je me réjouis tout autant que cela ait permis à la Fiducie de nouer bon nombre de partenariats productifs et collaboratifs. C’est l’essence même de la préservation du patrimoine!

Tout au long de ce discours, j’ai fait allusion à l’importance d’adopter une approche globale et holistique en matière de préservation du patrimoine. Il y a de nombreuses années, en réalité plusieurs décennies, lorsque je suis devenu président de la Commission des lieux et monuments historiques du Canada, on pensait que le patrimoine désignait les bâtiments anciens et tout ce qui va avec. Aujourd’hui, il est reconnu et admis que cette notion est beaucoup plus large et qu’elle englobe l’environnement global hérité du passé. Le patrimoine inclut des éléments concrets que l’on peut toucher : des bâtiments et des structures de toutes sortes, des sites industriels et archéologiques, des archives, des artéfacts, des documents et du matériel, ou bien encore des cimetières, des jardins, des paysages et, bien sûr, des richesses naturelles.

Mais le patrimoine inclut également des éléments abstraits, comme les coutumes, les valeurs, les connaissances et les croyances. C’est la somme de tout ce que nous avons et de tout ce que nous sommes, c’est-à-dire de tout ce que notre société a connu et produit jusqu’à ce jour. Plus récemment, les collectivités de toute la province ont commencé à intégrer cette notion élargie du patrimoine dans le cadre des festivités qu’elles organisent pour célébrer les arts et la culture. J’estime que les implications ne peuvent être que positives, tant sur le plan du patrimoine qu’en matière de création d’un esprit communautaire.

Bien entendu, cette définition élargie du patrimoine exige une collaboration et une coopération accrues entre les personnes, les organisations et les institutions qui en défendent la cause. Ruthven Park, à Cayuga, est un exemple caractéristique des nombreuses servitudes protectrices du patrimoine détenues par la Fiducie. En 1994, la famille Thompson a fait don à la Lower Grand River Land Trust de cette propriété de 1 600 acres qui fait l’objet d’une servitude protectrice du patrimoine culturel et naturel pour conserver ses nombreuses caractéristiques en la matière, incluant des forêts caroliniennes, des terres agricoles cultivées, des terres humides, des prés, deux cimetières et un manoir de style néo-gothique grec datant du XIXe siècle. En 1995, la Commission des lieux et monuments historiques du Canada a désigné Ruthven Park comme lieu historique national en raison de son importance architecturale et historique. Cet exemple magnifique montre ce qui peut être réalisé grâce aux efforts de collaboration entre le gouvernement et les organismes non gouvernementaux qui défendent des intérêts aux niveaux local, provincial et federal.

Je suis persuadé que beaucoup d’entre vous ici présents aujourd’hui ont également participé, et continuent de participer, en tant que membres de fiducies foncières, de clubs de naturalistes, d’organismes de conservation du patrimoine, d’offices de protection de la nature et d’autres organisations utiles de ce type, à des projets spécifiques qui répondent à cette définition élargie et qui nécessitent donc d’adopter une approche plus globale afin de collaborer et de coopérer pour défendre la cause commune du patrimoine.

L’approche du 400e anniversaire de l’incroyable voyage qui a permis à Champlain de découvrir le cœur du Canada devrait nous amener à faire preuve de créativité afin d’élaborer des programmes et de conclure des ententes pour rappeler et célébrer les anniversaires des événements qui ont marqué l’histoire de notre pays. Durant la période qui s’ouvre, le Canada célébrera plusieurs anniversaires importants. Le 400e anniversaire du voyage de Champlain sera rapidement suivi par le 200e anniversaire de la guerre de 1812, par le 150e anniversaire des rencontres des Pères fondateurs de la Confédération, en 1864, et par le 150e anniversaire de la Confédération canadienne, en 1867. Comme le rappelle le Jubilé de diamant de Sa Majesté la Reine, qui aura lieu dans seulement deux ans, la célébration du patrimoine peut revêtir des formes diverses, qu’il s’agisse de l’anniversaire de personnalités, de la commémoration de guerres ou d’événements constitutionnels ou bien de festivités liées à la nature et au milieu bâti. N’oublions pas non plus que l’année 2011 marquera le 100e anniversaire de la création de la Division des parcs du Dominion, le premier service national des parcs au monde, par Sir Wilfrid Laurier et J.B. Harkin.

Ces événements marquants pour notre culture, notre histoire et notre expérience commune constituent un défi important dans un avenir proche. C’est une occasion rare et particulière pour les fiducies foncières et les organismes apparentés en Ontario de faire valoir leur rôle dans notre société et de l’étoffer. Pour se préparer à ce défi, les défenseurs du patrimoine naturel, bâti ou culturel ont tout intérêt à élargir la portée et à accélérer le rythme de leurs activités éducatives et de défense des interest.

Il reste tant à faire! Nous devons continuer d’encourager cette approche holistique et collaborative en matière de préoccupations patrimoniales, afin de permettre aux membres des organismes que j’ai mentionnés de se rassembler et de collaborer avec des représentants de musées, de galeries d’art, d’organismes de conservation du patrimoine architectural et de sociétés historiques, avec des généalogistes, des bibliothécaires et des archivistes, avec des chefs d’entreprises et des agents de financement, ainsi qu’avec des jeunes, des membres des Premières Nations, des néo-Canadiennes et néo-Canadiens et des membres de toutes sortes d’organismes communautaires manifestant un intérêt en la matière. Pour en assurer l’avenir dans notre pays, il faut que le patrimoine devienne l’affaire de tous et qu’il fasse l’objet d’une collaboration dont tous les acteurs unissent leurs efforts pour défendre une cause commune dans un esprit de créativité et de collégialité. Comme l’indique si pertinemment le thème de votre conférence, nous devons continuer d’élargir nos horizons afin de pouvoir, au final, répondre à tous les enjeux interdisciplinaires liés au patrimoine bâti, culturel ou naturel, en les considérant comme des éléments interdépendants au lieu de les traiter séparément.

Permettez-moi de conclure – en tant que citoyen et président de la Fiducie du patrimoine ontarien – en vous remerciant pour tout ce que vous faites afin de recenser, de préserver et de promouvoir le riche patrimoine de notre province. Votre action est essentielle pour l’avenir de notre environnement et de notre société et pour permettre aux Canadiennes et Canadiens de savoir et de comprendre qui ils sont. Elle est essentielle pour notre sentiment communautaire et identitaire ainsi que pour notre spécificité et notre diversité. Elle est essentielle pour notre patrimoine. En effet, il se pourrait bien que cela soit un élément clé permettant à notre pays de subsister en tant que nation indépendante en Amérique du Nord.

En ces temps d’homogénéisation galopante avec nos grands voisins du Sud, il se pourrait que la façon dont nous conservons, respectons et exposons notre propre patrimoine fasse toute la différence. Notre patrimoine est riche et extraordinaire : les Ontariennes et Ontariens et les Canadiennes et Canadiens devraient en être fiers et il convient de le préserver jalousement. Si nous continuons de détériorer nos terres et notre patrimoine naturel et de faire table rase de notre patrimoine historique et bâti, le pronostic n’est pas bon. Mais je suis optimiste de nature et c’est en partie grâce à vous, à votre action et aux valeurs que vous défendez, que je continue d’être plein d’espoir.

J’espère que vos activités futures continueront d’être couronnées de succès.

Je vous remercie.