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Chef Francis Pegahmagabow, 1889-1952

Au 20 juin 2015, la Fiducie du patrimoine ontarien et la Première Nation Wasauksing ont dévoilé des plaques provinciales commémorant le héros de la Première Guerre mondiale et dirigeant des Premières Nations, le chef Francis Pegahmagabow. La cérémonie de dévoilement a eu lieu au centre communautaire autochtone Wasauksing, à Parry Island, en Ontario.

Voici le texte des plaques en Anishinaabemowin, anglais et français :

GAA-GIMAAWID FRANCIS PEGAHMAGABOW, 1889-1952

    Francis Pegahmagabow-ban, gii-Ojibwe-Nishnaabewi Adik gii-doodeman, gaa-ondaadzid maa Shawanaga. Gii-zhaa gaa-maajii-miigaading miinwaa wedi gaaming gaa-yaad ji-ndawaabnjiged miinwaa ji-giimoodzid gaa-ntaa-waakwiid maa Canadian Expeditionary Force netamsing Battalion. Ogii-wiiji-gaabwitawaan 39 Canada-zhimaagnishan eko-nising gaa-miin’goowaad Military Medal gaa-nji-zoong'dehewaad. Aapiji dash gii-gchi-miin’gowzid gaa-nishnaabe-zhimaagnishiiwid maanpii Canada. Gii-bi-dnizi maa Wasauksing gii-shkwaa-miigaading gaa-wiidged miinwaa gaa-ntaawgi’naawaad oniijaan’siwaan. Gii-gimaawi 1921-1925 miinwaa 1942-1945; gii-giigdo-niniiwi 1933-1936. Weweni gaa-dzhindang Nishnaabewiziwin maa Ottawa 1943. Pii dash Pegahmagabow miinwaa giw gaa-niigaanziwaad Nishnaabeg gaa-zhitoowaad Brotherhood of Canadian Indians, ntam gaa-wiidookdaadwaad gii-gchi-maawnjidwaad Nishnaabeg. Gii-naabnjigaazo Gaa-gichi-gimaawid maa National Indian Government 1949 miinwaa 1950. Gii-niigaanzi gaa-baa-dzhindang Nishnaabewiziwin, aapji gwa gii-gchi-nakiitwaad Francis Pegahmagabow owiiji-nishnaabeman maanpii Kiing.

LE CHEF FRANCIS PEGAHMAGABOW, 1889-1952

    Francis Pegahmagabow, un Ojibwe du clan du caribou, est né au sein de la Première Nation de Shawanaga. Au début de la Première Guerre mondiale, il se porte volontaire pour servir outre-mer comme éclaireur et tireur d'élite auprès du 1er bataillon du Corps expéditionnaire canadien. Il est l'un des 39 soldats canadiens à recevoir la Médaille militaire et deux agrafes en reconnaissance de ses actes de bravoure. Il est le soldat autochtone canadien ayant reçu le plus grand nombre de décorations. Après la guerre, Francis Pegahmagabow s'installe parmi la Première Nation Wasauksing, où il se marie et fonde une famille. Il est élu chef de bande de 1921 à 1925 et de 1942 à 1945, et conseiller de 1933 à 1936. En 1943, il manifeste pacifiquement à Ottawa en faveur des droits des Autochtones et de l'autonomie gouvernementale. La même année, il fonde avec d'autres dirigeants autochtones la Brotherhood of Canadian Indians, la première organisation autochtone nationale. En 1949 et 1950, il est élu chef suprême du gouvernement national indien. Ardent défenseur des droits des Premières Nations, Francis Pegahmagabow a rendu d'éminents services à sa patrie et honoré les Nishnaabeg.

CHIEF FRANCIS PEGAHMAGABOW, 1889-1952

    Francis Pegahmagabow, an Ojibwe of the Caribou clan, was born in Shawanaga First Nation. He volunteered at the onset of the First World War and served overseas as a scout and sniper with the Canadian Expeditionary Force’s 1st Battalion. He was one of 39 Canadian soldiers awarded the Military Medal and two bars for bravery. He is Canada’s most decorated Indigenous soldier. After the war, Pegahmagabow settled on Wasauksing First Nation, where he married and raised his family. He was elected Chief and served from 1921 to 1925 and from 1942 to 1945, and as a Councillor from 1933 to 1936. In 1943, he demonstrated peacefully in Ottawa for Aboriginal rights and self-government. That same year, Pegahmagabow and other Native leaders founded the Brotherhood of Canadian Indians, the first national Aboriginal organization. In 1949 and 1950 he was elected the supreme Chief of the National Indian Government. A leading advocate for First Nations rights, Francis Pegahmagabow provided distinguished service to his homeland and honour to the Nishnaabe Nation.

Historique

Enfance

Soldat des Premières Nations le plus décoré de l’histoire du Canada, Francis Pegahmagabow est né le 9 mars 1889 dans le clan Caribou de la nation Ojibwé (ce qui correspond aujourd’hui à la Première Nation de Shawanaga, dans la baie Georgienne), bien qu’il ait affirmé aux autorités militaires en 1914 être né deux ans plus tard.1 Il est l’enfant unique de Michael Pegahmagabow de la bande de Parry Island et de Mary Contin de la bande de Henvey Inlet.

En 1891, à la suite du décès de son père, Pegahmagabow a été élevé par des membres de sa famille et de la Première Nation de Shawanaga. À 12 ans, après avoir cherché un emploi dans les camps locaux de bûcherons, il a été au service d’entreprises de pêche dont les activités étaient centrées sur les îles Mink et à Pointe au Baril. À l’été 1912, poussé par le désir d’en savoir plus sur les Grands Lacs et le monde qui l’entoure, Pegahmagahbow s’est inscrit comme matelot sur le Lambton, un navire de 323 tonnes du ministère de la Marine et des Pêcheries qui naviguait sur le lac Huron et la baie Georgienne à partir de la base de Parry Sound, à s’occuper du balisage et à livrer des fournitures aux gardiens de phare isolés.2 Sa mère est retournée à Shawanaga et s’est remariée en 1892 mais, fait à souligner, Pegahmagabow s’est toujours qualifié d’orphelin et a même prétendu à l’armée qu’il était sans famille.3

Première Guerre mondiale

Nul ne sait avec certitude à quoi pensait le jeune Ojibwé Pegahmagabow lorsque le 13 août 1914, 10 jours à peine après l’entrée du Canada dans la Première Guerre mondiale, il s’est précipité au champ de foire de Parry Sound pour s’enrôler dans le 23e Régiment des Northern Pioneers. Peut-être percevait-il dans ce conflit la possibilité de laisser derrière lui une enfance douloureuse et de se distinguer comme guerrier, suivant la tradition de ses ancêtres. Sa détermination était si forte qu’à l’automne 1916, après avoir été blessé à la jambe gauche, il a supplié le ministère des Affaires indiennes de le renvoyer au combat afin de gagner plus de médailles.4

À Valcartier, à l’extérieur de Québec, le contingent de Parry Sound a été fusionné avec plusieurs centaines d’autres volontaires de Windsor, de London, de Sarnia, de Stratford et de Galt pour former le 1er bataillon du Corps expéditionnaire canadien, également appelé Régiment de l’Ouest de l’Ontario. Tandis que des centaines d’officiers et de recrues à Valcartier ont été renvoyés chez eux à titre de surnuméraires dont les services n’étaient pas requis dans le premier contingent, Pegahmagabow a été jugé physiquement apte au service outre-mer puis il a prêté serment au roi George V le 15 septembre.5 Le 1er Bataillon est arrivé en Angleterre plus tard ce mois-là et, en février 1915, il s’est embarqué pour la France après des mois de formation.

Au début de la guerre, Pegahmagabow a fait fonction de messager : en l’absence de radios, il devait livrer à la course des ordres et des dépêches tout en évitant les échanges de tirs nourris et les bombardements. Il jouait également le rôle d’éclaireur, pour lequel il devait sortir seul, surtout la nuit, afin de détecter et de rapporter la position et les mouvements de l’ennemi. Selon les écrits du fils d’un soldat ayant servi avec lui, Pegahmagabow infiltrait souvent les tranchées ennemies afin de se tenir parmi les occupants, simplement pour le plaisir.6 Une fois la guerre terminée, Pegahmagabow a confié à l’anthropologue Diamond Jenness qu’avant de partir outre-mer, il avait reçu d’un aîné un sac de plantes médicinales à des fins de protection.7

Il a acquis une grande réputation en tant que tireur d’élite, tâche pour laquelle il lui fallait demeurer camouflé et immobile durant de longues périodes à attendre, derrière la sécurité relative de ses propres lignes, l’occasion éphémère de prendre pour cible des soldats ennemis imprudents situés à des centaines de verges au loin. Ceux qui allaient devenir tireurs d’élite étaient triés sur le volet, non seulement en fonction de leur regard aiguisé et de leur adresse au tir, mais de leur patience inouïe. Pour se vanter, ou peut-être en toute sincérité, Pegahmagabow a affirmé à des journalistes à deux reprises en 1919 qu’il avait abattu 378 soldats du camp ennemi.8

En juin 1916, on lui a décerné la Médaille militaire pour souligner son courage sous le feu ennemi lorsqu’il devait transmettre des messages pendant les combats à Ypres, à Festubert et à Givenchy. Lors de l’assaut de Passchendaele en novembre 1917, il a reçu une agrafe à la décoration, puis une deuxième agrafe en août 1918 à la bataille de la Scarpe, durant laquelle il est sorti à la course d’une tranchée sous les mitrailles nourries de l’ennemi pour aller chercher des munitions alors que l’approvisionnement de sa compagnie était presque épuisé et que celle-ci risquait d’être encerclée.9 Il a été l’un des 39 soldats canadiens à recevoir la Médaille militaire avec deux agrafes pendant la Première Guerre mondiale.

L’après-midi du 27 août 1919, le prince de Galles Édouard, qui deviendrait ultérieurement le roi Édouard VIII, lui a décerné la Médaille militaire avec deux agrafes à l’occasion d’une cérémonie à l’Exposition nationale canadienne, à Toronto.10 Ce jour-là, il comptait parmi les 200 soldats de retour qui étaient décorés devant une foule évaluée à plus de 50 000 personnes par les journaux de Toronto.

Les années d’après-guerre

Après la guerre, le caporal Francis Pegahmagabow s’est établi dans ce qui constitue actuellement la Première Nation de Wasauksing, près de Parry Sound, où il a épousé Eva Tronche en 1919 et élevé une famille de quatre garçons et de deux filles. Mais au terme de quatre années de combats brutaux, la vie de cet ancien combattant dans la réserve n’aurait rien d’un fleuve tranquille, loin de là.

Globalement, les années d'après-guerre n’ont pas souri à Pegahmagabow, car sa santé s’est affaiblie presque dès sa démobilisation. En raison de ses limitations physiques manifestes, son emploi a consisté essentiellement à guider, l’été, les pêcheurs à la ligne et, l’automne, les chasseurs durant leurs vacances, bien qu’il ait navigué pendant un certain temps sur le Grenville, navire de 497 tonnes du ministère de la Marine et des Pêches.

En mai 1919, peu de temps après sa démobilisation, Pegahmagabow a ressenti des douleurs thoraciques et été admis à l’hôpital de Parry Sound. Il a finalement obtenu son congé après un mois de repos au lit; on lui a diagnostiqué une hypertrophie cardiaque, probablement causée par une attaque de pneumonie subie à l’étranger. Un médecin a informé le Bureau des commissaires des pensions pour le Canada que Pegahmagabow était invalide à 30 %, mais le Bureau a d’abord refusé de lui verser une pension parce que sa santé ne semblait pas poser problème au moment de sa démobilisation.11 En avril 1930, le Bureau lui a finalement consenti une pension d’invalidité de 10 % pour cause de bronchite et d’emphysème. Ce pourcentage a été porté à 20 % une décennie plus tard.12

Si les médecins durant la Première Guerre mondiale étaient capables de soigner convenablement les simples blessures par balle, la psychiatrie n’en était encore qu’à ses balbutiements et ils en savaient peu sur les symptômes des traumatismes dus au bombardement ou crâniens. Les dossiers médicaux de Pegahmagabow comportent plusieurs allusions au fait qu’il a été enterré par des éclats d’obus et sauvé par ses compagnons d’armes, et qu’il a saigné des oreilles au moins une fois.

Malgré son héroïsme sur le champ de bataille, lorsque Pegahmagabow a demandé à maintes reprises un prêt en vertu de la Loi d'établissement des soldats, 1919, on le lui a refusé parce que l'agent local des Affaires indiennes a formulé l’avis suivant : « J’ai la certitude qu’il ne deviendra jamais agriculteur et l’inviter à contracter un prêt à cette fin ne peut que nuire, à lui et au Ministère, à l’avenir. »13 [traduction libre]

Le conseil de bande de Parry Island a adopté quatre fois – en octobre 1920, en avril 1921, en août 1922 et en mars 1939 – des résolutions accordant à Pegahmagabow des prêts en vue de l’achat d’un attelage de chevaux pour le défrichage de sa terre mais, dans chaque cas, le ministère des Affaires indiennes a opposé son veto, compte tenu de l’avis formulé par l’agent local. « Je n’ai pas envie d’assumer la responsabilité des malheureux animaux qui pourraient lui être confiés si un prêt lui était consenti » [traduction libre], a écrit l’agent Alexander Logan en août 1922, bien que Pegahmagabow ait alors déjà défriché manuellement 4 hectares (10 acres) et construit une écurie.14

Au cours des années 1920, Pegahmagabow a cherché à obtenir l’égalité et le respect dont il avait bénéficié dans les tranchées : il s’est engagé dans la compagnie Alpha du 23e régiment de milice des Northern Pioneers à Parry Sound, d’abord à titre de sergent, puis en tant que sergent-major.15 Il y est demeuré actif jusqu’en décembre 1936, mois où ce régiment a fusionné avec le régiment Algonquin et cessé d’exercer une présence locale.

Ironie du sort, alors que Pegahmagabow avait dans un premier temps acquis un statut de héros au Canada grâce à ses faits d’armes, c’est le déclenchement d’un autre conflit mondial qui a favorisé l’amélioration de sa situation financière. En effet, après que le Canada a déclaré la guerre à l’Allemagne en 1939, l’usine relativement petite de Canadian Industries Ltd. à Nobel, au nord de Parry Sound, s’est convertie à la production d’explosifs militaires en temps de guerre, comme elle l’avait fait durant la Première Guerre mondiale. À la demande du gouvernement du Canada, elle a également mis sur pied une filiale dans la même région que Defence Industries Ltd. (DIL). De 1940 jusqu’au printemps 1944, la filiale construite, exploitée et gérée par DIL a compté un effectif de quelque 4 100 travailleurs. Pegahmagabow y est devenu gardien de sécurité en 1941.

Chef et conseiller

Pendant les quatre années passées à patauger dans la boue en des lieux tels qu’ Ypres, Givenchy, Cambrai et Passchendaele, Pegahmagabow a gagné le respect de ses compagnons d’armes pour qui ses aptitudes d’éclaireur et de tireur d’élite étaient vitales. La race et la couleur importaient peu dans les tranchées où les hommes dépendaient les uns des autres pour demeurer en vie au fil d’effrayantes batailles. Une fois revenu au Canada, Pegahmagabow a refusé d’accepter le statu quo de la vie dans les réserves et l’autorité outrancière de l’agent local des Affaires indiennes. En janvier 1921, après son élection à titre de chef de la bande de Parry Island, il a manifesté un vif intérêt quant à la correction de nombreuses transgressions et violations du traité Robinson-Huron relativement aux terres réservées à la bande.

Dans son étude des rapports entre les communautés des Premières Nations de Parry Island et de Wikwemikong avec leur agent respectif des Affaires indiennes entre les deux guerres mondiales, Robin Jarvis Brownlie a relaté que les écrits de l'agent de Parry Sound John McLean Daly « dépeignent les dirigeants comme étant irrationnels, mesquins, insensés et intéressés : une technique privilégiée par la DIA pour écarter les porte-parole autochtones. Daly dépeint leurs griefs comme de simples prétextes pour faire des vagues et rechercher l’autoglorification »16 [traduction libre]. En ce qui concerne Pegahmahabow, Daly a également été en mesure d’exploiter la prétendue démence de l’ancien combattant pour décrédibiliser des plaintes légitimes. Dans une lettre informant le quartier général des efforts déployés par Pegahmagabow pour obtenir la collaboration de diverses bandes afin d’adresser directement au roi George V, sans passer par les Affaires indiennes, une pétition pour le redressement de leurs griefs, Daly formule ce qui suit : « Je dois dire que les Blancs et les Indiens du district sont d’avis globalement que Pegahmagabow n’est pas tout à fait sain d’esprit »17 [traduction libre].

Au début de son premier mandat de chef, Pegahmagabow a écrit au ministère des Affaires indiennes pour proposer d’exclure certaines personnes de la réserve, ce qui lui a aliéné une partie de la communauté de Parry Island. De plus, Pegahmagabow affirmait que non seulement Daly décrédibilisait-il le conseil, mais qu’il affichait un parti pris au sein de la bande en invitant les gens à ne pas s’associer à lui.18 Pegahmagabow a survécu à trois pétitions déposées pour le destituer, après quoi il s’est fait réélire en janvier 1924.

Manifestement mécontent de la réélection de Pegahmagabow en tant que chef et aucunement désireux de composer avec lui au cours des trois années suivantes, Daly a recommandé au ministère des Affaires indiennes de destituer Pegahmagabow et il est probablement intervenu dans la diffusion d'une autre pétition. « De l’avis général, durant son mandat à titre de chef, Francis Pegahmagabow a suscité des difficultés, s'est adressé à des avocats, a défié le Ministère et a rendu la bande insatisfaite de son sort et de la façon dont le Ministère gère les réserves » [traduction libre], a-t-il écrit au sujet d'une réunion du conseil pendant laquelle la dernière pétition la plus récente a été longuement discutée. « La bande ne veut pas que son chef se tourne vers d’autres bandes pour tenter de susciter des difficultés au sujet des traités : elle estime que le Ministère est capable de s’occuper de ce dossier »19 [traduction libre].

Sur les conseils d’Affaires indiennes, Daly s’est résolu à persuader Pegahmagabow de son « impopularité » et à obtenir sa démission. Au bout du compte, Pegahmagabow a démissionné en août 1925, mais il a été réélu en tant que conseiller en février 1933 pour un mandat de trois ans, puis à titre de chef en janvier 1942.

Vers un leadership autochtone national

Au cours des années 1920, de nombreux anciens combattants autochtones se sont inspirés des principes adoptés par la Société des Nations, comme le lieutenant Frederick Ogilvie Loft, un Mohawk des Six Nations. En septembre 1919, il a fondé la Ligue des Indiens du Canada, dont il est devenu président.20 Peu de temps après son élection comme chef de la bande de Parry Island en 1921, Pegahmagabow a rencontré Loft lors d’un rassemblement à Parry Sound et s’est engoué de ses idées.21 Le conseil de bande de Parry Island a adopté une résolution pour se joindre à la Ligue des Indiens du Canada et, peu de temps après cette rencontre, Pegahmagabow a entrepris une croisade pour unir sa bande et plusieurs bandes avoisinantes dans la formulation de leurs griefs communs contre le ministère des Affaires indiennes.

Après la guerre et jusqu’à son décès, Pegahmagabow n’a cessé de s’exprimer avec franchise sur les droits et l’autonomie gouvernementale des Autochtones. En octobre 1943, il a fait partie d’une délégation nationale qui a manifesté sur la Colline du Parlement à Ottawa afin d’exempter les Autochtones de l’impôt sur le revenu et de la conscription. Les membres de cette délégation ont ensuite fondé la Brotherhood of Canadian Indians, la toute première organisation autochtone véritablement nationale. Il est devenu membre du gouvernement national indien lors de sa formation à Ottawa en juin 1945, puis il en a été élu chef suprême en 1949 et en 1950.

Le caporal Pegahmagabow s’est éteint à l’hôpital St. Joseph de Parry Sound le 5 août 1952.


La Fiducie du patrimoine ontarien tient à remercier sincèrement Adrian Hayes dont les travaux de recherche nous ont permis de rédiger le présent document.

© Fiducie du patrimoine ontarien, 2015


1 Dans une rubrique biographique de l’Encyclopédie canadienne, Franz Koennecke indique que la date de naissance de Pegahmagabow est le 9 mars 1889, ce que la fille de Pegahmagabow, Marie Anderson, a confirmé lors d’un entretien en personne le 2 février 2005. Il était inscrit sur sa pierre tombale d’origine, érigée par Anciens Combattants Canada, que Pegahmagabow avait 64 ans lorsqu’il est décédé, de sorte qu’il serait né en 1888. Dans son formulaire d’attestation du Corps expéditionnaire canadien, il est indiqué que sa date de naissance est le 9 mars 1891.

2 Archives publiques de l’Ontario, MS 137 (vol. 1), Parry Island Reserve Records. Ce microfilm comprend un compte rendu de la vie de Pegahmagabow, qu’il a rédigé lui-même. L’accès à ces documents est limité par le conseil de bande de la Première Nation de Wasauksing. L'auteur a consulté des copies des documents d’origine chez Franz Koennecke, le 30 janvier 1999. M. Koennecke, qui s’est éteint subitement le 16 novembre 1999, était au service du groupe des traités de la baie Georgienne et de la rivière French.

3 Bibliothèque et Archives Canada (BAC), RG 150, versement 199-93/16, boîte 7701-23, dossier personnel du cpl Francis Pegahmagabow; BAC, RG 10, vol. 2572, dossier 116,331-pt. 0, (bobine C-12,787), « Parry Sound Indian Superintendent is Reporting the Death of Michael Pegahmagabow (sic) and he is asking for authority to enter the names of his Widow and Son on the Parry Island Band Paylist, 1891 », Dr. Thomas S. Walton to Deputy Superintendent of Indian Affairs L. Vankoughnet, 26 mai 1891; BAC, RG 10, vol. 9505, (bobine C-7168), « Parry Island Robinson Treaty Payments, 1871-1893 ».

4 BAC, RG 10, vol. 3181, dossier 124-1A (bobine C-11,335), Pegahmagabow to Indian Affairs, 8 mars 1917.

5 Dossier personnel.

6 John Macfie, « A Fighting Man Called ‘Peggy’ was a War Hero », dans Georgian Bay Beacon, 11 novembre 1982, p. A-3. Réimpression dans Now and Then: Footnotes to Parry Sound History, [Parry Sound, Becaon Publishing Company (1983)], p. 107-109.

7 Diamond Jenness, The Ojibwa Indians of Parry Island, Their Social and Religious Life [Ottawa, Imprimeur du Roi, (1935)], p. 53.

8 dans Parry Sound North Star, 15 mai 1919, p. 5 et « Prince and Pegahmagabow », dans Toronto Evening Telegram, 28 août 1919, p. 13.

9 Les témoignages évasifs à propos de la Médaille militaire avec deux agrafes ont été fournis à l’auteur par John Beaucage, qui était alors chef de la Première Nation de Wasauksing. M. Beaucage a acheté plusieurs documents officiels du Corps expéditionnaire canadien mis aux enchères sur le site Web de eBay en mars 2003. À l'époque, il a affirmé que le vendeur était évasif quant à la façon dont il avait pris possession des documents. Le Musée canadien de la guerre n’a pu fournir d’explication logique pour justifier le fait que ces documents se trouvaient entre les mains d’un particulier plutôt que dans un dépôt d’archives comme Bibliothèque et Archives Canada.

10 « Pegahmagabow is Decorated by Prince Edward », dans Parry Sound North Star, 4 septembre 1919, p. 1.

11 Anciens Combattants Canada (ACC), dossier de pension no 126927, cpl. Francis Pegahmagabow, Stanley B. Coristine, Board of Pension Commissioners to Dr. Wood, 28 novembre 1919.

12 Dossier de pension d’ACC, Recommendation for award of pension, 9 avril 1930; Dr. G.C. Anglin to Dr. A.C. Rowswell at the Department of National Health, 19 février 1940. Le Dr Anglin a noté ce qui suit : « J’estime que sa bronchite s’est plutôt aggravée depuis sa dernière visite, mais elle n’est pas en soi très invalidante. Le patient devrait être en mesure d’effectuer de nombreux types de travaux légers. Le tour de garde en des circonstances raisonnablement favorables ne devrait pas se situer au-delà de sa capacité. »

13 BAC, RG 10, vol. 7502, dossier 25022, (bobine C-14,790). « Parry Sound Agency, Soldier Settlement, Francis Pegahmagabow », Alexander Logan to Indian Affairs, 5 janvier 1920.

14 BAC, RG 10, série B-3, vol. 7376, dossier 16022-17, « Perry (sic) Sound – Band Loan – F. Pegahmagabow », Alexander Logan to Indian Affairs, 17 août 1922.

15 « Military Notes », dans Parry Sound North Star, 3 septembre 1926, p. 1.

16 Robin Jarvis Brownlie, A Fatherly Eye: Indian Agents, Government Power, and Aboriginal Resistance in Ontario, 1918-1939, [Toronto, Oxford University Press (2003)], p. 57.

17 BAC, RG 10, vol. 8021, dossier 475/37-7-8-9, « Parry Sound Agency – Correspondence Regarding the affairs of Chief Francis Pegahmagabow of the Parry Island Band », John McLean Daly to Secretary of Indian Affairs J.D. McLean, 25 mai 1924.

18 dans Brownlie, p. 33. Pegahmagabow a écrit un jour : « Il y a dans cette réserve trop de non-membres, de Métis et de Blancs avec qui composer » [traduction libre]. Consulter BAC, RG 10, vol. 3161, dossier 363644, (bobine C-11,332), Pegahmagabow to Indian agent John McLean Daly, 9 mars 1939.

19 BAC, RG 10, vol. 7927, dossier 32-22, Indian agent John McLean Daly to Secretary of Indian Affairs J.D. McLean, 3 avril 1925.

20 BAC, RG 10, vol. 3211, dossier 527787, point 1, (bobine C-11 340), « Formation of a Canadian League of Indians by F.O. Loft of the Six Nations Band, 1919-1935 ». Consulter également Peter Kulchyski, « A Considerable Unrest: F.O. Loft and the League of Indians », dans Native Studies Review, vol. 4, no 1-2 (1988).

21 dans Parry Sound North Star, 9 juin 1921, p. 4.