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Sir Byron Edmund Walker, C.V.O., LL.D., D.C.L. 1848-1924

Le samedi 3 septembre 2005, à 14 h, la Fondation du patrimoine ontarien a dévoilé une plaque provinciale commémorant Sir Byron Edmund Walker à Innisfree Place dans la Ville d’Innisfil.

Voici le texte de la plaque:

SIR BYRON EDMUND WALKER, C.V.O., LL.D., D.C.L. 1848-1924

    Né dans le comté de Haldimand, M. Walker est entré très jeune à la nouvelle Canadian Bank of Commerce. Il en a fait l’une des principales institutions financières au Canada. Il a contribué à la rédaction de la Loi sur les banques, pierre angulaire du système bancaire national canadien. En 1907, il est devenu président de la Bank of Commerce, poste qu’il a occupé jusqu’en 1924. M. Walker était aussi un généreux mécène des arts, contribuant à la fondation et à l’entretien de nombreux établissements culturels et éducatifs canadiens, comme l’Université de Toronto, le Musée des beaux-arts du Canada, la Champlain Society, l’école Appleby, le Musée des beaux-arts de l’Ontario et le Musée royal de l’Ontario. En 1910, le roi George V anoblit Byron Walker pour sa contribution au monde des affaires et des arts. M. Walker acheta des terres dans le canton d’Innisfil pour en faire une retraite campagnarde pour sa famille (baptisée « Innisfree » par sa femme Mary), et construisit, en 1913, la ferme Innisfree.

SIR BYRON EDMUND WALKER, C.V.O., LL.D., D.C.L. 1848-1924

    Born in Haldimand County, Walker joined the new Canadian Bank of Commerce at an early age, transforming it into one of Canada’s leading financial institutions. He helped to author the Bank Act, cornerstone of Canada’s national banking system. By 1907, he was president of the Bank of Commerce, a position he held until 1924. Walker was also a generous patron of the arts, helping to found and nurture many of Canada’s cultural and educational institutions, including the University of Toronto, National Gallery of Canada, Champlain Society, Appleby School, Art Gallery of Ontario and Royal Ontario Museum. In 1910, King George V knighted Walker for his contributions to business and the arts. Walker assembled land in Innisfil Township for a family retreat that his wife Mary named “Innisfree” and built Innisfree Farm in 1913.

Historique

L’enfance

Byron Edmund Walker est né le 14 octobre 1848 à la campagne près de Caledonia, dans le canton de Seneca, comté de Haldimand, dans le Canada ouest.

Son grand-père, Thomas Walker, qui était fabricant de boîtiers de montre à Londres, en Angleterre, arriva dans le Haut-Canada (devenu entre-temps l’Ontario) en 1834, avec quatre de ses neuf enfants, quelques livres et quelques tableaux. La mort de sa femme et de quatre de ses enfants pesa pour beaucoup dans sa décision de quitter Londres pour le Canada. Le troisième de ses plus jeunes enfants Alfred Edmund Walker, père de Sir Edmund, était un fermier qui devint greffier tout en étant naturaliste amateur, paléontologue et peintre d’aquarelles. En 1845, Alfred Edmund épousa Fanny Murton, de Hamilton. Les parents de Fanny avaient aussi émigré d’Angleterre, en 1832. Son père, William Murton, avait fait des études secondaires et sa mère parlait italien et français et jouait du clavecin. Elle dirigeait également une école primaire privée à Hamilton.1

Byron Edmund (ou Edmund, comme il préférait qu’on l’appelle) était le deuxième des neuf enfants des Walker. La famille quitta sa ferme, près de Caledonia, pour Hamilton, en 1852. C’est là, à l’âge de quatre ans, qu’Edmund démarra ses études à l’école de sa grand-mère puis à la Hamilton Central School où il fit ses six premières classes. Il espérait mener une carrière d’enseignant, mais sa mauvaise santé le priva de son inscription à l’école normale de Toronto, l’école pour les enseignants fondée en 1851 par Egerton Ryerson. À l’âge de 12 ans, Edmund Walker entra au service de son oncle, John Walter Murton, qui possédait un bureau de change à Hamilton.

Une brillante carrière

En travaillant au bureau de change de son oncle, Edmund Walker devint expert pour reconnaître les billets contrefaits mis en circulation pendant la guerre de Sécession. Après sept années dans la société de son oncle, il passa quelques mois à Montréal, mais sa mauvaise santé l’obligea à revenir, en 1868, à Hamilton où il commença à travailler en tant que commis à l’escompte à la nouvelle Banque Canadian Bank of Commerce.

La Canadian Bank of Commerce fut fondée en 1867 par l’industriel William McMaster. Wiliam McMaster servit d’exemple au jeune Edmund, qui gravit rapidement les échelons. En 1872, il fut nommé chef comptable au siège de la banque, à Toronto. En mai 1873, la banque envoya Edmund Walker à New York en tant qu’agent débutant. Chargé de la responsabilité d’accorder des prêts en or contre des espèces, il réussit à maintenir des marges correctes malgré la banqueroute soudaine de nombre de ses clients. L’entreprenant Edmund Walker fut ensuite envoyé à la succursale de la banque à Windsor, en 1875. En 1878, il fut nommé responsable de la succursale de London, en Ontario, et une année plus tard il devint inspecteur de la banque; en 1880 il revint à Hamilton en tant que directeur.

Edmund Walker épousa Mary Alexander en 1874, alors qu’il vivait à New York. Ils eurent quatre fils et trois filles. Mary Alexander était la fille d’Alexander Alexander, un menuisier qui avait émigré d’Écosse à Lockport, État de New York, en 1834. Cette année-là, il épousa Isabella Buchan et déménagea à Hamilton, en Ontario, où il devint épicier. Ils eurent cinq enfants.

De 1881 à 1886, Edmund Walker était de retour à New York en tant qu’agent conjoint, ce qui lui fournit l’occasion d’approfondir ses talents dans le domaine des devises étrangères et de pratiquer des activités bancaires internationales à une bien plus grande échelle. Il put y développer son intérêt pour la culture, en visitant galeries et musées, et commença sérieusement sa collection d’objets d’art. En 1886, à l’âge de 38 ans, Edmund Walker fut rappelé à Toronto en tant que directeur général de la Canadian Bank of Commerce. À cette époque, la banque comptait 30 succursales en Ontario, en plus des agences de Toronto, Montréal et New York. Les avoirs de la banque à sa création étaient de 2 997 081 $; 50 ans plus tard, ils s’élevaient à 440 310 703 $ avec des succursales dans tout le pays; cette croissance résultait pour une grande part de l’énergique direction d’Edmund Walker.

Edmund Walker est connu pour avoir conçu le premier recueil de règlements écrits pour transformer la banque en un réseau complexe de services; on lui impute largement le mérite de la révision de la Loi sur les banques qui a doté le Canada d’un système bancaire centralisé, antipanique. Edmund Walker était par ailleurs professionnellement respecté au plan international. En tant que vice-président de l’American Bankers’ Association, il fut invité par un comité du Congrès américain pour le conseiller sur le projet de législation de la Réserve fédérale. Il a occupé de nombreux postes clés sur la scène nationale et internationale : président de la section bancaire du Toronto Board of Trade, de 1891 à 1892; vice-président de la Canadian Bankers’ Association (qu’il a aidé à fonder en 1891) en 1893, et président de 1894 à 1895; président de la Commission royale de 1899 sur la position financière de la province de l’Ontario; et président de la section Argent et Crédit à l’Exposition universelle de 1904, à St. Louis. Il était membre de l’Institute of Bankers of England et de la Royal Economic Society of England.

En 1906, il fut nommé président de la Canadian Bank of Commerce. Il en a assuré l’administration de 1907 jusqu’à sa mort, en 1924.

Ses relations politiques

En 1908, Edmund Walker fut nommé à la Commission des champs de bataille nationaux par le gouvernement libéral de Sir Wilfred Laurier. La commission était chargée de récupérer les terres ne relevant pas de la Couronne pour créer un « Parc des champs de bataille » dans la ville de Québec où se déroula, entre les forces anglaises et françaises, la bataille des Plaines d’Abraham. La commission avait aussi mission de superviser les dépenses engagées pour la célébration du tricentenaire de la fondation du Québec par Champlain, en 1608. Plus tard, Edmund Walker fut nommé président du comité canadien pour le centenaire de la paix, une manifestation organisée par les gouvernements canadien, américain et britannique pour commémorer 100 années de paix entre le Canada et les États-Unis, succédant à la guerre de 1812-1814.

En dépit des efforts d’Edmund Walker pour rester toute sa vie en dehors de la politique active et ne jamais appartenir à un quelconque parti politique, il décida de jouer un rôle pivot dans l’arène politique, avec un groupe de 18 hommes d’affaires de premier plan qui s’opposaient à l’accord de réciprocité avec les États-Unis souhaité par le gouvernement Laurier. Edmund Walker craignait que les fiducies américaines géantes paralysent le marché canadien, dès lors qu’elles seraient autorisées à y pénétrer. De plus, en tant qu’ardent patriote et impérialiste convaincu, il redoutait un affaiblissement des liens entre le Canada et la Grande-Bretagne, qui conduirait finalement à une annexion par les États-Unis. Le courant anti-réciprocité conduisit, en 1911, à la défaite du gouvernement Laurier. Edmund Walker fut de ceux qui conseillèrent le nouveau premier ministre conservateur, Sir Robert Borden, pour qu’il protège la stabilité financière du Canada durant la Première Guerre mondiale.

Son intérêt pour l’éducation

Edmund Walker tenait de son père sa grande curiosité et son désir d’apprendre; il regretta toujours que sa santé fragile l’ait empêché de suivre des études plus académiques. Il pensait qu’une société civilisée avait pour fondement son système éducatif et que les universités d’un pays étaient ses institutions les plus précieuses. Tout au long de sa vie, il manifesta un vif intérêt pour les établissements éducatifs. Il voua très tôt et durablement un intérêt particulier à l’Université de Toronto. En 1887, les établissements confessionnels de Victoria College (méthodiste), Knox College (presbytérien), Wycliffe College (école théologique anglicane), St. Michael’s College (catholique) avaient, avec l’établissement séculaire du University College, fondé une fédération, la seule à être financée par le gouvernement. Après que le feu ait, en 1890, détruit la partie est du University College, Edmund Walker contribua à convaincre le gouvernement de l’Ontario d’accorder sa première subvention à l’Université unifiée de Toronto.

Il fut aussi chargé d’amener le dernier collège confessionnel — Trinity College, affilié à l’Église d’Angleterre — à rejoindre, en 1904, la fédération, créant ainsi l’Université de Toronto. Trinity College lui décerna la même année un doctorat de droit civil (D.C.L.). En 1905, il fut nommé membre de la Commission royale sur la réorganisation de l’université, qui devint responsable d’obtenir par la suite les subventions annuelles du gouvernement. Au cours de ses 32 années au service de l’université, Edmund Walker occupa les fonctions d’administrateur (de 1892 à 1906), de sénateur (de 1893 à 1901), de membre du conseil des gouverneurs (de 1906 à 1910), de président (de 1910 à 1923) et de chancelier (de 1923 à 1924).

Grâce à ses efforts, le Conservatoire de musique de Toronto put aussi faire partie de l’université. Il fut également membre de son conseil des gouverneurs, avant d’en assurer la présidence (de 1917 à 1924). Dans le domaine musical, il accorda également son soutien au Mendelssohn Choir, dont il fut président honoraire (de 1900 à 1924).

Compte tenu de son engagement durable envers l’éducation et l’importance de l’histoire canadienne comme outil de développement de l’identité et du patriotisme canadiens, il fonda la Champlain Society, en 1905. Créée comme organisation sans but lucratif, elle avait pour mandat de publier des documents importants portant sur l’histoire du Canada, et des projets que les éditeurs commerciaux considéraient comme non rentables. Il considérait cette société comme son plus beau succès.2 Il en fut président jusqu’à sa mort.

Il est l’auteur d’articles sur des sujets très variés — le métier de banquier, Robert Browning, l’art italien et l’art japonais. Il n’est donc pas étonnant qu’Edmund Walker soit l’un des fondateurs de la Société canadienne des auteurs, créée pour promouvoir la littérature canadienne et pour protéger les auteurs par des lois sur les droits d’auteur. Edmund Walker en assura la présidence de 1904 à 1909.

En 1911, Edmund Walker créa l’Appleby School, un pensionnat privé pour garçons, pour lequel il fit l’acquisition de la propriété initiale de 32 acres, à Oakville.3

L’amour de l’art

Grâce à ses années passées à New York et à ses voyages, dès sa jeunesse, en Europe, y compris à Londres en 1887 et en Italie en 1892, Edmund Walker devint un fin connaisseur en matière d’œuvres d’art et un collectionneur avisé; il fit de nombreuses conférences sur ce thème. Sa collection d’objets d’art était exposée dans sa résidence de Toronto, « Long Garth », au 99 de la rue St. George. Cette demeure victorienne en brique possédait un intérieur en bois raffiné, des plafonds avec des décorations Art Nouveau de Gustav Hahn, et des peintures murales allégoriques de George Agnew Reid. « Long Garth » recelait un trésor d’eaux-fortes, de gravures, de broderies et de tapis orientaux, de bronzes, d’objets en cuivre et en ivoire, de porcelaine, sans oublier sa collection de fossiles et sa riche bibliothèque. Edmund Walker éprouvait une fascination particulière pour l’imprimerie et l’on disait que son œil exercé à déceler les détails des billets contrefaits renforçait ses connaissances d’expert. Edmund Walker était aussi membre de la Japan Society of America et la partie la plus remarquable de sa collection, 1 070 gravures japonaises sur bois, fut, à sa mort, léguée au Musée royal de l’Ontario. Entre 1880 et 1924, il rassembla une collection de grande valeur, comptant plus de 400 œuvres d’art graphique, datant du 15ème au 19ème siècles, y compris des œuvres de Dürer et de Rembrandt. Ses enfants ont fait don de cette collection au Musée des beaux-arts de l’Ontario, en 1926.

Outre l’achat de peintures d’artistes canadiens, le premier contact d’Edmund Walker avec le monde des artistes canadiens commença lorsqu’il fut contacté par des artistes de renom de Toronto qui sollicitaient son aide pour constituer une guilde. Avec ces personnes, profanes ou artistes, qui partagaient les mêmes goûts et les mêmes idéaux, il constitua la Toronto Guild of Civic Art. Dirigée par George Agnew Reid, la guilde milita pour des améliorations urbaines. Edmund Walker fut son premier président, en 1897. En tant que représentant de la guilde au comité chargé de sélectionner l’artiste retenu pour réaliser le monument dédié au lieutenant-gouverneur John Graves Simcoe à Queen’s Park, Edmund Walker fut largement responsable de l’attribution de cette commande au sculpteur Walter S. Allward. Plus tard, Edmund Walker fut responsable de la commande passée à Walter Allward pour la conception du South African War Memorial (monument commémoratif de la Guerre des Boërs), sur l’avenue University, à Toronto.4

Edmund Walker et le Musée des beaux-arts de l’Ontario

Les relations d’Edmund Walker avec George Agnew Reid conduisirent à la fondation du Musée des beaux-arts de l’Ontario. Le 15 mars 1900, George Reid, alors président de l’Ontario Society of Artists, rassembla un groupe de citoyens pour envisager la création d’un musée des beaux-arts à Toronto. Lors de cette réunion, un conseil provisoire du musée des beaux-arts fut mis en place avec Edmund Walker comme président et George Reid comme secrétaire. Grâce à des pressions et une campagne de collecte de fonds efficaces (5 000 $ pour chacun des dix bienfaiteurs), l’Assemblée législative de l’Ontario vota cette année-là une loi créant le Musée des beaux-arts de Toronto. Edmund Walker devint président de son conseil d’administration et le resta jusqu’à sa mort. Le défi initial consistait à trouver un toit pour ce nouvel établissement. Ce fut Edmund Walker qui réussit à convaincre ses amis, l’écrivain le Dr Goldwin Smith et sa femme, l’ex Mme William Henry Boulton, de laisser leur maison historique, « The Grange », au nouveau musée.5 Avant que la nouvelle ne devienne publique, Edmund Walker acheta les terrains environnants pour que le musée ait suffisamment d’espace pour son expansion future. Le Musée des beaux-arts de Toronto (rebaptisé plus tard Musée des beaux-arts de l’Ontario) ouvrit officiellement ses premières galeries dans la « Grange », en avril 1913. En 1926, deux ans après sa mort, alors que le musée prenait de l’expansion, la Canadian Bank of Commerce fit don des fonds nécessaires à la construction de la magnifique salle qui porte son nom, Walker Court.

Edmund Walker et le Royal Ontario Museum

La campagne en faveur d’un musée de classe internationale pour Toronto fut conduite par Edmund Walker, le philanthrope Sir Edmund Boyd Osler, alors directeur du Canadien Pacifique et président de la Dominion Bank, et Charles Trick Currelly, premier conservateur du Royal Ontario Museum of Archaeology. En tant qu’archéologue, M. Currelly avait effectué des travaux sur le terrain en Égypte, Crète et Asie mineure dans le but de rassembler des objets qui constitueraient le cœur de la collection du petit musée qu’il fonda au Victoria College, en 1907. Mais il désirait un musée plus grand pour l’université, et d’autres personnes se rallièrent rapidement à ses idées. Edmund Walker et Sir Edmund Boyd Osler, entre autres, fournirent des fonds et sollicitèrent du gouvernement une aide financière.

Ensemble, Sir Edmund Boyd Osler et Edmund Walker créèrent un schéma d’organisation pour le musée, incluant la façon dont le financement devait être réparti entre l’université et le gouvernement. En 1912, la Loi sur le Musée royal de l’Ontario fut votée. Un conseil d’administration fut créé, les nominations étant également partagées entre l’université et le gouvernement. Edmund Walker en fut le premier président.

Le Royal Ontario Museum ouvrit ses portes le 19 mars 1914. M. Currelly en devint le directeur, en 1914, et le resta jusqu’à sa retraite, en 1946; Edmund Walker resta président du conseil d’administration jusqu’à sa mort. Dans les années qui suivirent l’ouverture du musée, il fit des dons financiers et apporta son aide par de généreuses lignes de crédit consenties par la Canadian Bank of Commerce, notamment pour d’importantes acquisitions d’objets chinois par M. Currelly. La collection de fossiles d’Edmund Walker devint le noyau de la collection de paléontologie du musée et, pour cette raison, on donna son nom à un dinosaure, le Parasaurolophus walkeri, en 1922. Son intérêt et son soutien pour la paléontologie avaient conduit précédemment à une association avec le Royal Canadian Institute, une autre institution scientifique qu’il présida de 1898 à 1900.

Edmund Walker et le Musée des beaux-arts du Canada

Lors de la première exposition officielle de la Royal Canadian Academy of Arts, le 6 mars 1880, le gouverneur général, le marquis de Lorne, fonda le Musée des beaux-arts à l’hôtel Clarendon, à Ottawa. Un conseil consultatif des beaux-arts fut créé en 1907; il était présidé par Sir George Drummond, président de la Banque de Montréal, et avait pour secrétaire le sénateur de Montréal, Arthur Boyer; Sir Edmund Walker, nouvellement nommé à la présidence de la Canadian Bank of Commerce, en faisait également partie. Le conseil était chargé de donner au gouvernement son avis sur l’architecture et la décoration des bâtiments et monuments publics. Il était responsable de sélectionner et d’acheter des objets d’art pour la collection du musée. Sir George Drummond favorisa l’acquisition d’œuvres européennes alors que Sir Edmund Walker insistait pour que l’on inclue des œuvres d’art canadiennes.6 À la mort de Sir George Drummond en 1909, Sir Edmund Walker devint président du conseil. Son influence en tant que collectionneur d’œuvres graphiques joua un rôle crucial dans le lancement de la section Gravures et dessins du musée, qui fut inaugurée en 1911.7

Il appartenait aussi au conseil de donner son avis au sujet du Victoria Memorial Museum (devenu entre-temps le Musée des sciences naturelles d’Ottawa), qui fut inauguré en 1913. La même année, la Loi de la Galerie Nationale du Canada fut votée; elle instituait un conseil d’administration indépendant; Edmund Walker en fut nommé président, poste qu’il assuma jusqu’à sa mort. Ses membres avaient, entre autres, la responsabilité de développer, de promouvoir et d’entretenir « le bon goût artistique en matière de beaux-arts ».8 En 1924, cette collection comptait plus de 4 000 objets.

Edmund Walker et les « Peintures des scènes de guerre » du Canada

Edmund Walker a joué un rôle clé dans la création de ce qui est aujourd’hui la collection de « Peintures des scènes de guerre » de la Première Guerre mondiale, qui est maintenant exposée au Musée canadien de la guerre à Ottawa. En 1915, le financier canadien qui s’était expatrié, William Maxwell Aitken (devenu plus tard le baron Beaverbrook), fut nommé archiviste officiel, en Angleterre, des documents des Forces canadiennes. Le baron Beaverbrook créa le Canadian War Memorials Fund chargé de conserver pour la postérité les informations sur les opérations de cette guerre. En tant que membre du comité du fonds et président du conseil d’administration du Musée des beaux-arts, Edmund Walker insista pour que des commandes soient aussi confiées à des artistes canadiens, au même titre qu’aux artistes britanniques proposés par le baron Beaverbrook. En 1918, un grand nombre d’artistes canadiens, et parmi eux A.Y. Jackson et Frederick Varley, étaient en Europe et dessinaient des usines d’armement ou divers théâtres d’opérations auxquels participaient des Canadiens. D’autres artistes, comme C.W. Jefferys, illustraient l’effort de guerre depuis le Canada. En 1921, la collection financée par Beaverbrook et consacrée à la guerre fut confiée au Musée des beaux-arts.

Edmund Walker siègea aussi comme membre des commissions canadienne et britannique sur les archives et trophées de guerre, formées en 1918. Le plan canadien prévoyait la construction, sur la promenade Sussex, à Ottawa, d’un musée pour les Peintures des scènes de guerre et d’un hall des trophées. Les tentatives de 1922 et 1923 pour achever le bâtiment n’aboutirent pas et peintures et trophées durent être prêtés. En 1971, les peintures furent transférées du Musée des beaux-arts au Musée canadien de la guerre où elles sont maintenant exposées.

Innisfree

Pour ses repos de fin de semaine, Edmund Walker commença en 1890 à acheter des terrains à la pointe De Grassi dans le canton d’Innisfil, comté de Simcoe. « Innisfree », comme l’appelait sa femme, devint le centre de la vie de famille des Walker. Il y construisit « Broadeaves » conçu par l’architecte canadien de renom Frank Darling. Frank Darling était l’architecte de l’Université de Toronto et conçut de nombreux bâtiments liés à Edmund Walker, comme Convocation Hall et Trinity College à l’Université de Toronto et la Canadian Bank of Commerce (devenue entre-temps Commerce Court North), dans la rue King Ouest, à Toronto. En 1913-1914, Edmund Walker construisit « la Ferme Innisfree » pour renforcer son intérêt pour l’élevage du bétail. Innisfree fut confiée en fiducie à ses descendants en tant que fiducie foncière privée. Gérée de nos jours avec l’aide du ministère des Richesses naturelles de l’Ontario, Innisfree est classée zone d’intérêt naturel et scientifique en raison de ses prairies herbeuses et de ses vestiges de l’écosystème d’une forêt ancienne.9

Les dernières années

Sir Byron Edmund Walker a marqué de son empreinte le développement financier, artistique, et intellectuel du Canada. Il pensait que :

    Lorsque nous rencontrons un homme qui a consacré toute sa vie à ne faire que de l’argent et qui, ce faisant, n’a rien créé, qui ne peut pas lire de livres, apprécier les belles choses ou se laisser tenter par les sports, alors nous savons qu’il a gâché sa si précieuse vie. Quel doit donc être le destin d’une nation qui ne donne pas à la vie intellectuelle et artistique la place qui lui est due.10

Génie de la finance, expert du monde du change et des affaires internationales, il fit d’une petite banque une institution nationale et fut grandement responsable de la restructuration du système bancaire canadien. Simultanément, il créa toute une série de symboles culturels – le Musée des beaux-arts du Canada, la collection des « Peintures des scènes de guerre » formant le noyau du Musée canadien de la guerre, le Musée des beaux-arts de l’Ontario, le Royal Ontario Museum, la Champlain Society, la fédération des collèges qui a donné naissance à l’Université de Toronto – et bien d’autres encore. Paléontologue amateur, il fut aussi un auteur d’importance. Il fut annobli par le roi George V, et fait chevalier de grâce de l’Ordre de l’hôpital Saint-Jean de Jérusalem; le Japon le nomma consul-général honoraire du Japon. Edmund Walker mourut à l’âge de 75 ans, le 27 mars 1924. Après sa mort, le Globe and Mail publia cette description d’Edmund Walker : « Il n’y eut vraisemblablement, à son époque, aucun Canadien doté de talents aussi divers; à vrai dire, peu de gens en ont fait autant pour le Canada ».11


La Fondation du patrimoine ontarien tient à remercier Fern Bayer de ses travaux de recherche sur lesquels repose le présent document.

© Fondation du patrimoine ontarien, 2005


1 La jeunesse d’Edmund Walker est décrite dans la thèse de maîtrise ès arts de Barbara Marshall, « Sir Edmund Walker, Servant of Canada », qui n’a jamais été publiée (Université de Colombie-Britannique, 1971). Voir aussi George P. de T. Glazebrook, Sir Edmund Walker. Londres, 1933; et Harold A. Hunter et E. Robert Hunter, The Genealogy of the Walker, Murton and Alexander Families. Mimeo, Toronto, 1989.

2 « History: Sir Byron Edmund Walker », site Web de la Champlain Society.

3 Il fut rebaptisé Appleby College en 1941.

4 John Bentley Mays, « Beautifying Toronto by bits and pieces », The Globe and Mail (Toronto), 9 juillet 2004.

5 « Fine Portrait of True Art Lover Adorns ‘Grange’ », Toronto Star Weekly, 22 janvier 1921.

6 « Canada’s National Gallery — A Letter From Sir Edmund Walker », Saturday Night, 23 décembre 1922.

7 « Historique du musée », site Web du Musée des beaux-arts du Canada.

8 Ibid.

9 Heidenreich, C.E. …and go to Innisfree. (Toronto : General Store Publishing House, 1989).

10 Marshall, p. 75-76.

11 « A giant oak has fallen and all Canada mourns loss of great native son », Toronto Globe, 28 mars 1924.