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Theodore Pringle Loblaw 1872-1933

Le 20 septembre 2008, la Fiducie du patrimoine ontarien, l’Association historique du comté de Simcoe, Stevenson Farms et l’Essa Historical Society ont dévoilé une plaque provinciale à Stevenson Farms, près d’Alliston, en Ontario, commémorant Theodore Pringle Loblaw, 1872-1933.

Voici le texte de la plaque bilingue :

THEODORE PRINGLE LOBLAW 1872-1933

    T.P. Loblaw, né à Elmgrove (Ontario), est le fils de William James Loblaw et d’Isabella Stevenson. Orphelin dans son adolescence, il a été élevé par ses grands-parents d’origine écossaise, William et Elizabeth Stevenson, qui vivaient dans la ferme sur cette propriété. À 17 ans, il est parti à Toronto avec vingt dollars en poche et un rêve en tête. En 1897, il a épousé Isabella Adam et en 1900 il a acheté sa première épicerie sur la rue College, avec son partenaire J. Milton Cork. M. Loblaw a lancé le concept des magasins d’alimentation libre-service qui proposent toutes sortes de produits alimentaires en un même lieu; il a ouvert la première Groceteria Loblaw en 1919. Ses méthodes de marchandisage innovantes ont révolutionné la façon dont les personnes faisaient leurs courses au Canada. Il a fait des dons généreux en faveur de l’Hôpital Toronto Western, du Toronto Kiwanis Club et de l’Hôpital Stevenson Memorial. M. Loblaw est enterré au Alliston Union Cemetery. Il a été intronisé au Temple de la renommée de l'entreprise canadienne en 1999.

THEODORE PRINGLE LOBLAW 1872-1933

    T.P. Loblaw was born in Elmgrove, Ontario to William James Loblaw and Isabella Stevenson. Orphaned in his teens, he was raised by his Scottish-born grandparents, William and Elizabeth Stevenson, who lived in the farmhouse on this property. At age 17 he moved to Toronto with twenty dollars and a dream. In 1897, Loblaw married Isabella Adam and in 1900 purchased his first grocery store on College Street with partner J. Milton Cork. Loblaw pioneered the concept of self-service grocery stores that provided all types of food products under one roof and opened the first Loblaw Groceteria in 1919. His innovative merchandising methods fundamentally changed the way that people shopped for food in Canada. He donated generously to the Toronto Western Hospital, the Toronto Kiwanis Club and Alliston’s Stevenson Memorial Hospital. Loblaw is buried at the Alliston Union Cemetery. He was inducted into the Canadian Business Hall of Fame in 1999.

Historique

Au début des années 1900, l’approche novatrice de T.P. Loblaw dans le secteur de l’épicerie témoignait d’une vision et d’une détermination hors du commun. En 1927, il exprima son engagement envers la modernisation et un bon rapport qualité-prix pour les consommateurs. Il se tourna vers d’autres détaillants qui craignaient que les pratiques de marchandisage amélioré et de forte réduction des prix prônées par Henry Ford dans ses magasins de vente au détail aboutiraient à une réduction des profits. « Quiconque améliore les méthodes, de façon à ce que le public en profite, rend un service. Les autres doivent s’adapter aux nouvelles méthodes.1 » À l’instar des industriels américains, Loblaw est devenu millionnaire en créant un concept de marchandisage révolutionnaire qui réduisait de façon significative les coûts pour le consommateur. Une plus grande rotation des stocks lui permettait d’acheter en gros et de toujours fournir des produits frais aux consommateurs. Le nouveau concept de Loblaw appliquait le concept de cafeteria libre-service au magasinage en épicerie. Les « groceterias » ont révolutionné la façon dont les gens font leurs courses et le concept de vente au détail.2

Theodore Pringle Loblaw est né le 1er juillet 1872 à Elmgrove dans le canton d’Essa, en Ontario.3 Son père est mort lorsqu’il était nourrisson et sa mère lorsqu’il avait 15 ans. Au décès de sa mère, Theodore fut adopté par ses grands-parents maternels, William Stevenson et Elizabeth Pringle, et alla habiter dans leur ferme, non loin d’Alliston.4 Plus tard, Loblaw et son frère James (« Jack ») achèteraient la ferme Stevenson, qui est, encore aujourd’hui, dans la famille.5

À l’âge de 17 ans, Loblaw travailla comme laboureur dans une ferme locale et réussit à mettre de côté 20 $. Avec un dollar provenant de ses économies, 10 $ donnés par son frère et un nouveau costume offert par sa soeur, il se rendit à Toronto à la recherche d’un meilleur emploi. Il fut embauché par J. Milton Cork6 pour travailler dans son épicerie, la Cork’s Cash Grocery, située au 400, rue King Est. Tous les samedis soirs, après son travail, il enfourchait sa bicyclette et rentrait à Alliston pour retourner à Toronto tôt le lundi matin.7 Il se rendait à des cours du soir deux fois par semaine et continuait à mettre de l’argent de côté.8 Il confia un peu plus tard : « Plus je vieillis, plus je suis convaincu que la différence entre l’employé qui économise une partie de son salaire et celui qui le dépense intégralement est la même différence qui existera quelques années plus tard entre le propriétaire d’un commerce et la personne sans emploi ».9

En 1897, Loblaw épousa Isabella Adam. En 1900, il prit une participation dans un magasin de la rue College avec son ancien employeur, J.M. Cork. Ce fut le début d’un partenariat commercial à vie entre les deux hommes.10 Leur deuxième magasin, situé au 511, rue Yonge, fut le premier à porter l’appellation « Loblaws ». Loblaw estimait qu’il pouvait appliquer le concept de grand magasin à l’épicerie en gérant une chaîne de magasins, en achetant de grosses quantités de produits moins chers et en répercutant les économies sur les consommateurs. En 1919, il possédait 19 épiceries de style traditionnel.11 Lorsqu’il décida de les vendre, ces épiceries servirent de point de départ à la chaîne de magasins Dominion, l’un des futurs concurrents de Loblaw.12

Cette année-là, Loblaw devint le directeur de la coopérative United Farmers of Ontario, un poste qui l’amena à se déplacer à travers les États-Unis. À l’occasion d’un de ses déplacements, il se rendit dans les magasins libre-service « Piggly Wiggly », lesquels avaient été fondés en 1916 par Clarence Saunders à Memphis, au Tennessee.13 Loblaw décida de voir si ce système de « groceteria » fonctionnerait en Ontario, un système de magasinage en épicerie qui avait recours à ce que Loblaw appelait des méthodes de « raccourci ». Loblaw attribuait son désir de gagner du temps et de l’argent à ses origines écossaises du côté de ses grands-parents maternels et au fait d’avoir été élevé à la ferme. Il racontait souvent comment il avait soigneusement mis de l’argent de côté dès son plus jeune âge.14 Une nuit, en reconduisant J. Milton Cork chez lui, il évoqua avec lui la possibilité de créer une chaîne de grands magasins bien éclairés, propres et peints de couleurs vives qui fourniraient le meilleur service possible à la clientèle. Il voulait que les détaillants soient capables de fixer leurs propres prix et de se démarquer des prix établis par les producteurs et les entreprises de transformation. Les profits seraient réalisés grâce à la vente de gros volumes à des prix moins élevés.15

La première Groceteria Loblaw ouvrit en juin 1919.16 Cork fournit une partie du capital et assura la gestion du magasin. Celui-ci était divisé en trois sections : une entrée, une zone consacrée à la vente et une réserve. Les clients pouvaient sélectionner eux-mêmes les marchandises sur les étals du magasin au lieu d’être servis par des commerçants. Alors que dans les autres magasins, on se servait dans des récipients ouverts contenant des produits secs tel que l’avoine, la farine et le sucre et placés à même le sol, dans le nouveau magasin, on achetait des emballages hermétiques d’aliments qui évitaient ainsi d’être souillés par la poussière et la saleté. Après avoir rempli leurs paniers, les clients les amenaient à l’un des comptoirs situés près de l’entrée. Les articles étaient placés dans des sacs pour permettre aux clients de les ramener chez eux et la note était réalisée par une machine à additionner. Auparavant, les commandes d’épicerie étaient généralement livrées à domicile par des livreurs à bicyclette et la note était portée au compte individuel du client. La généralisation de l’automobile favorisa les nouvelles méthodes de magasinage; il était alors plus facile pour les clients de rapporter eux-mêmes leurs achats chez eux. En outre, l’adoption de la glacière domestique, qui serait ensuite remplacée par le réfrigérateur, permettait de conserver des matières périssables à la maison plus longtemps. Finalement, tous les types d’aliments furent mis à la disposition des clients sous un même toit dans les magasins Loblaws, ce qui évitait aux clients d’avoir à se rendre dans plusieurs magasins, comme la boucherie, la boulangerie et la fromagerie. Une idée simple mais révolutionnaire pour l’époque.17

En 1921, Loblaw et Cork créaient Loblaw Groceterias Company Limited, en utilisant leurs deux premiers magasins comme point de départ. La compagnie s’agrandit avec une rapidité fulgurante. Des magasins ouvrirent en Ontario, avec des filiales dans l’État de New York, en Pennsylvanie et à Chicago, en Illinois. Chaque magasin comptait en moyenne 3 000 pieds carrés18 de surface de vente. En 1928, chaque magasin avait un objectif de 250 000 $ de chiffre d’affaires annuel.19 Cette même année, Loblaw construisit un entrepôt de quatre étages ultra-moderne aux coins des rues Fleet et Bathurst, qui abritait des installations de loisirs destinées aux 800 employés de Loblaw. Le centre de loisirs comprenait un grand salon, des pistes de quilles, des salles de billard, des salles de jeux de cartes et une salle de concert dotée d’une scène.20

En dépit de sa fortune, T.P. Loblaw n’oublia jamais ses origines. En 1926, il fit un don de 100 000 $ pour la construction de l’Hôpital Stevenson Memorial d’Alliston. Comptant parmi les établissements les plus modernes de son époque, l’hôpital fut ouvert en 1928 et baptisé en hommage aux grands-parents maternels de Loblaw.21 Si la ville d’Alliston fut en mesure de paver ses rues en 1929, ce fut grâce à un autre don de Loblaw.22 Cette même année, Loblaw et Cork firent un don de 1 million de dollars pour financer la construction du nouvel Hôpital Toronto Western.23 Loblaw siégea comme membre du Kiwanis Club of Toronto, fut directeur de la YMCA et membre du Conseil des gouverneurs de l’Hôpital Toronto Western, de l’Église Unie du Canada, de la Grand Lodge of Ancient Free and Accepted Masons of Canada et de l’Ordre international des Forestiers.24

En 1933, la chaîne créée par Loblaw comptait 107 magasins en Ontario et plus de 50 magasins aux États-Unis.25 Mais le 2 avril de cette même année, T.P. Loblaw décéda des suites d’une intervention chirurgicale mineure à l’Hôpital Toronto Western. Il fut enterré au Alliston Union Cemetery.26 Son épouse était décédée avant lui, mais il laissa leurs quatre enfants adoptifs.27 Dans son testament, Loblaw dispensait l’Hôpital Stevenson Memorial du remboursement des 125 000 $ que l’Hôpital lui devait et faisait don de 25 000 $ au Collège Emmanuel de l’Université Victoria.28 Le testament établissait également la « T.P. Loblaw Charitable Trust » qui devait être administrée par le Downtown Kiwanis Club of Toronto pour venir en aide aux garçons défavorisés et mener diverses activités caritatives à Toronto.29

Outre son organisation caritative, le principal héritage de Loblaw est la chaîne de magasins de style « groceteria » qui révolutionna le monde de l’épicerie. Les idées novatrices de T.P. Loblaw, à l’instar de celles d’Henry Ford, sont restées bien vivantes et ont radicalement changé la façon dont les personnes font leurs achats de produits alimentaires et d’autres articles. Aujourd’hui, « Loblaw » est le plus important distributeur de produits alimentaires et un fournisseur majeur pour les articles d’usage courant, la pharmacie et les produits et services financiers.


La Fiducie du patrimoine ontarien tient à remercier Dave Osborne, de l’Université Laurentienne, de ses travaux de recherche sur lesquels repose le présent document.

© Fiducie du patrimoine ontarien, 2008


1 « Ford Benefactor as Retail Grocer », Toronto Daily Star, Pages of the Past, 30 mars 1927 (accès : 7 novembre 2004), 23.

2 B.E.S. Rudachyk, « Theodore Pringle Loblaw Biography », The Barrie Advance, 21 novembre 1999. Alliston: Simcoe County Heroes Collection (accès : 24 septembre 2004).

3 Encyclopedia Canadiana, (Toronto: Grolier of Canada, 1977), 193.

4 Robert E. Harrison, éd. Theodore Pringle Loblaw (Loblaw & Stevenson) Family Study, (North York: Robert Harrison, 1996) 22.

5 R.E. Knowles lors d’un entretien avec T.P. Loblaw, « Wealth has not Spoiled Canada’s Groceteria King », Toronto Daily Star, Pages of the Past, 27 février 1929 (accès : 11 novembre 2004), 2.

6 Knowles, Toronto Daily Star, 27 février 1929, 2.

7 Harrison, Loblaw & Stevenson Family Study, 24, conversation avec le membre de la famille et l’amie intime de T.P. Loblaw, Mme Mary Elspeth (Wood) Milne.

8 The Globe, 3 avril 1933, the globeandmail.com (accès : 21 novembre 2004), 1.

9 Harrison, Loblaw & Stevenson Family Study, 35, citation provenant d’un article du Alliston Herald du 26 juillet 1930, bande microfilm no 20, bibliothèque d’Alliston.

10 Knowles, Toronto Daily Star, 27 février 1929, 2.

11 R.E. Knowles lors d’un entretien avec T.P. Loblaw, « Wealth has not Spoiled Canada’s Groceteria King », Toronto Daily Star, Pages of the Past, 27 février 1929 (accès : 24 avril 2008), 1.

12 Seventy-fifth anniversary: a celebration, Loblaw Companies Limited, (Toronto: Loblaw, 1996), 31.

13 Piggly Wiggly. « Where it began … » (accès : 21 novembre 2004).

14 R.E. Knowles lors d’un entretien avec T.P. Loblaw, « Wealth has not Spoiled Canada’s Groceteria King », Toronto Daily Star, Pages of the Past, 27 février 1929 (accès : 11 novembre 2004), 2.

15 Seventy-fifth anniversary, 31-33.

16 Robert E. Harrison, éd. Theodore Pringle Loblaw (Loblaw & Stevenson) Family Study, (North York: Robert Harrison, 1996) 47-48.

17 Seventy-fifth anniversary, 33.

18 914 mètres carrés.

19 Seventy-fifth anniversary, 37.

20 « Fine Recreation Club for Employees », Toronto Daily Star, Pages of the Past, 4 octobre 1928 (accès : 11 novembre 2004), 2.

21 « To Build Hospital for Orangeville, Barrie », Toronto Daily Star, Pages of the Past, 6 décembre 1926 (accès : 11 novembre 2004), 7.

22 Rudachyk, « Loblaw Biography ».

23 « Grocery Magnates Give $1,000,000 to Hospital », Toronto Daily Star, Pages of the Past, 26 février 1929 (accès : 11 novembre 2004), 1.

24 Harrison, Loblaw & Stevenson Family Study, 39.

25 Harrison, Loblaw & Stevenson Family Study, 36.

26 Harrison, Loblaw & Stevenson Family Study, 39.

27 Theodore et Isabella n’avaient pas d’enfants, mais ils adoptèrent une petite-nièce, Jean Agnes Loblaw (1917-1993). Par ailleurs ils étaient les parents adoptifs de trois neveux, Alexander Burr-Loblaw (né en 1904), John Burr-Loblaw (né en 1906) et James Fraser Burr-Loblaw. Les garçons étaient devenus orphelins au décès de la soeur d’Isabella, en Écosse. Theodore et Isabella firent venir les garçons au Canada et les élevèrent, de même que Jean, comme leurs propres enfants.

28 Harrison, Loblaw & Stevenson Family Study, 40.

29 Rudachyk, « Loblaw Biography ».