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Women’s Law Association of Ontario

Le 27 février 2020, la Fiducie du patrimoine ontarien et la Women’s Law Association of Ontario (WLAO) ont dévoilé une plaque provinciale à la Osgoode Hall Law School de Toronto en hommage aux contributions de la Women’s Law Association of Ontario et pour honorer et célébrer 100 ans de défense des droits et d’autonomisation des femmes.

Voici le texte de la plaque bilingue :

WOMEN’S LAW ASSOCIATION OF ONTARIO

    Fondée en 1919, la Women’s Law Association of Ontario (WLAO) a été le premier organisme à travailler activement afin de réserver une place pour les femmes à Osgoode Hall. En permettant aux étudiantes en droit, aux avocates et aux juges d’y adhérer, l'organisme à but non lucratif promeut les enjeux propres aux femmes en droit par le biais d’événements de réseautage, éducatifs et sociaux. Avec le soutien du mouvement des droits des femmes, les 100 premières années de la WLAO ont marqué la nomination de la première avocate du Canada au barreau, la première femme à diriger l’organisme de réglementation du barreau provincial et la première femme juge nommée à la Cour suprême du Canada. Les campagnes de la WLAO ont incité les législateurs, les décideurs, les avocats et les juges à éliminer la discrimination et à renforcer l’égalité devant la loi. Dans le cadre de la défense des droits, la WLAO a recherché l'équité en matière d’emploi et de salaire, la réforme de la justice pénale et la fin de la violence sexiste, du racisme, de la discrimination fondée sur le handicap, de l'homophobie et de la transphobie. La WLAO continue de renforcer l’autonomie des femmes dans la profession juridique en apportant une voix collective et en défendant l'égalité, la diversité et le changement.

WOMEN’S LAW ASSOCIATION OF ONTARIO

    Founded in 1919, the Women's Law Association of Ontario (WLAO) was the first organization to work actively to create a place for women at Osgoode Hall. With membership open to law students, lawyers and judges, the non-profit organization advances issues relevant to women in law through networking, educational and social events. Strengthened by the women's rights movement, the WLAO's first 100 years marked Canada's first female lawyer being called to the bar, the first female leader of the regulator of the provincial bar, and the appointment of Canada's first female Supreme Court of Canada judge. The WLAO's campaigns influenced legislators, policy-makers, lawyers and judges to dismantle discrimination and enhance equality through law. Through advocacy, it fought employment and pay equity, criminal justice reform, and an end to gendered violence, racism, disability discrimination, homophobia and transphobia. The WLAO continues to empower women in the legal profession by providing a collective voice, and advocating for equality, diversity and change.

Historique

La Women’s Law Association of Ontario (WLAO) est fondée à Toronto en 19191. Clara Brett Martin est l’oratrice principale lors du dîner annuel inaugural au salon de thé Inglewood (au croisement de l’avenue Spadina et de la rue Bloor) le 17 février 19202. Admise au barreau à Toronto en 1897, Clara Brett Martin devient la première femme avocate au Canada, ainsi que dans le Commonwealth britannique3. Elle y est parvenue grâce aux efforts de la première vague féministe, qui a lutté pour l’accès à l’éducation supérieure et à certaines professions, pour le droit de vote, pour les droits de propriété des femmes mariées et pour la sobriété à la fin du XIXe et au début du XXe siècles4. Au début, peu de femmes suivent Clara Brett Martin dans la voie juridique, mais en 1919, Laura Denton Duff et Helen Currie fondent la WLAO pour mettre à l’honneur le premier groupe notable5. En réponse au Lawyers Club, qui n’accepte pas les membres féminines jusque dans les années 1970, la WLAO lutte pour surmonter les multiples obstacles à l’égalité en droit.

Au cours des nombreuses décennies avant que les femmes avocates ne parviennent à la parité en nombre avec leurs confrères masculins, les membres de la WLAO œuvrent en faveur de profondes réformes légales et sociales, tout en cultivant une communauté de soutien à l’égard des femmes dans le secteur juridique. Elles organisent des réunions régulières, le plus souvent à Toronto, mais aussi occasionnellement à Hamilton, London, Ottawa, et dans d’autres villes dans lesquelles les femmes avocates exercent en nombre suffisant pour se rassembler. Elles soutiennent la réforme de la détention juvénile et l’amélioration des normes du travail, des droits de propriété des femmes, de la législation sur le divorce et l’adoption, et de l’accès à l’aide sociale. Elles donnent bénévolement des conférences publiques sur le droit pénal, les droits des propriétaires et des locataires, l’itinérance, les successions, l’assurance et le droit immobilier. Grâce à leurs protestations, elles parviennent à contrer les efforts de l’Ontario visant à renvoyer toutes les femmes avocates employées dans la fonction publique au cours de la Grande Dépression des années 1930. Elles résistent face aux intentions discriminatoires du gouvernement de diminuer le salaire des femmes avocates dans les années 1940. Elles créent une bourse d’études en l’honneur de Clara Brett Martin, proposent des séminaires de formation professionnelle, surveillent la manière dont les femmes dans le secteur juridique sont évoquées dans la presse, et organisent des bals et des dîners saisonniers6.

Elles célèbrent l’octroi du titre de King’s Counsel à une femme, Helen Kinnear, pour la première fois en 1934 (une première au Canada et dans le Commonwealth britannique); il s’agit d’un titre prestigieux octroyé aux avocats chevronnés de renom. Elles célèbrent une autre première en 1943, lorsque qu’Helen Kinnear est la première femme à être nommée juge de la cour de comté dans le Commonwealth britannique7. Helen Kinnear se voit octroyer le titre de présidente honoraire de la WLAO en 1949. Margaret Baird Campbell, qui occupe le poste de présidente de la WLAO de 1949 à 1951, est nommée juge de tribunal de la famille en 1971, puis est élue députée provinciale en 19738. La campagne menée par la WLAO en faveur de la nomination d’un plus grand nombre de femmes juges connaît un succès majeur avec la nomination de Mabel Van Camp, présidente de la WLAO de 1957 à 1962, en tant que première femme juge à la Cour supérieure de justice de l’Ontario en 19719. Laura Legge, présidente de la WLAO de 1964 à 1966, est la première femme à être élue conseillère du Barreau de l’Ontario en 1975, puis trésorière du Barreau en 1983, devenant ainsi la première femme à la tête du Barreau.

Le nombre de femmes avocates n’augmente que progressivement entre les années 1920 et 1960; leur nombre grimpe durant les périodes de guerre, du fait des places libérées lorsque les hommes sont enrôlés dans l’armée, pour redescendre à la fin des conflits avec le retour des vétérans à leur poste. Au cours de ces décennies, les femmes exercent souvent seules, ou sont employées en tant que seule femme au sein de petits cabinets. Les avocates plaidantes sont très rares dans les salles d’audience. La plupart des femmes sont chargées des tâches administratives. Les femmes restent en marge de la profession10.

Les années 1970 voient la première augmentation prolongée et significative de leur nombre. Ce phénomène se poursuit à un rythme soutenu jusqu’à ce que la parité soit à peu près atteinte au Canada, lors du centième anniversaire de la WLAO. Cette évolution illustre la force croissante de la deuxième vague féministe, dans le cadre de laquelle les féministes sont en quête de nouvelles possibilités concernant la politique électorale, l’éducation, les médias, la famille, la santé et le bien-être, le marché du travail, les sports et les arts11. Cela donne lieu à l’arrivée d’un nombre sans précédent de femmes dans les professions juridiques au cours des décennies suivantes. Soutenues par le puissant mouvement féministe dans la société dans son ensemble, les femmes avocates osent affronter le sexisme et la discrimination plus ouvertement et plus radicalement12.

À la fin du XXe siècle, une multitude de nouvelles problématiques sont au cœur des débats : discrimination en matière d’embauche et de promotion, écarts de rémunération, harcèlement sexuel, agression sexuelle, brutalité conjugale, et discrimination envers les minorités raciales et les communautés autochtones. Les membres de la WLAO militent pour le congé parental, la garde d’enfants, l’accès au statut de partenaire dans des plus grands cabinets d’avocats, les droits des personnes handicapées, et l’égalité pour les personnes gaies, lesbiennes et transgenres, autant de sujets pour lesquels la vigilance reste de mise au XXIe siècle13.

Le President’s Award de la WLAO récompense chaque année depuis 1987 des femmes avocates et juges de renom. Bertha Wilson, première femme juge de la Cour suprême au Canada, est mise à l’honneur en 1990. Margaret Hyndman c.r., première femme avocate à intervenir auprès du Conseil privé à Londres, est récompensée en 1989. Les récipiendaires récentes sont représentatives de la diversité croissante au sein de la profession; diverses contributions sont ainsi mises à l’honneur telles que celles des avocates afro-canadiennes Marva Jemmott c.r. (co-fondatrice de la Delos Davis Law Guild, première association d’avocats noirs) et Arleen Huggins (figure de L'Association des avocats noirs du Canada, de l’Association du Barreau canadien et de l’Association du Barreau de l’Ontario), de la juge afro-canadienne Juanita Westmoreland-Traoré (première juge noire au Québec), de l’avocate d’origine asiatique Avvy Yao-Yao Go (connue pour son travail de défense des intérêts de clients chinois et d’Asie du Sud demandant l’équité raciale), ainsi que de l’avocate autochtone Delia Opekokew (première personne des Premières Nations admise au Barreau de l’Ontario et au Barreau de la Saskatchewan)14. Certains observateurs du mouvement féministe associent l’évolution de ces dernières décennies à l’émergence d’une troisième vague féministe, en quête d’une plus grande inclusivité concernant la race, le handicap, et les diverses identités sexuelles. Les activités de la WLAO reflètent ces évolutions majeures du militantisme féministe.

La longévité de la WLAO est exceptionnelle. Cet organisme à but non lucratif, auquel peuvent adhérer les étudiantes en droit, les avocates et les juges, a pour objectif de faire avancer les causes liées aux femmes dans le domaine juridique grâce à des manifestations pédagogiques, sociales et de réseautage. Ses campagnes pour l’égalité ont une incidence sur les législateurs, les décideurs politiques, les avocats et les juges. Ses archives historiques ont été rassemblées par des générations de membres, mais la contribution majeure est due à Abby Bushby, archiviste bénévole de la WLAO, qui travaille depuis quatre décennies pour veiller à ce que ce précieux héritage reste accessible dans les années à venir.


La Fiducie du patrimoine ontarien tient à exprimer sa gratitude à Constance Backhouse pour le travail de recherche effectué dans le cadre de la rédaction de cet article.

© Fiducie du patrimoine ontarien, 2022


1 Abby Bushby, « The Early Years: Sources of an Enduring Tradition. The Women’s Law Association of Ontario 1919-1950 », Archives du Barreau de l’Ontario.

2 « Women’s Law Association Holds Dinner », The Globe and Mail, 17 février 1920, p. 10.

3 Constance Backhouse, Petticoats & Prejudice: Women and Law in Nineteenth-Century Canada, 2e éd., Toronto : Canadian Scholar’s Press/Women’s Press, 2015.

4 Alison Prentice, et coll., Canadian Women: A History, Toronto: Harcourt, Brace, Jovanovich, 1988.

5 Abby Bushby, « The Early Years... »

6 « Government employs three women lawyers », The Globe and Mail, 1930, archives de la WLAO détenues par le Barreau de l’Ontario, vol. 3, p. 34; Abby Bushby, « The Early Years... ».

7 Abby Bushby, « The Early Years... »

8 Histoire orale : « The Honourable Margaret Fasken Baird Campbell », Osgoode Society.

9 Constance Backhouse, Two Firsts: Bertha Wilson and Claire L’Heureux-Dubé at the Supreme Court of Canada, Toronto : Second Story Press, 2018. La cour est alors dénommée Cour suprême de l’Ontario.

10 Cameron Harvey, « Women in Law in Canada », Manitoba Law Journal, vol. 4, 1970, p. 9. Pour obtenir des chiffres, consulter l’annexe A, p. 289 dans Constance Backhouse et W. Wesley Pue, The Promise and Perils of Law, Toronto : Irwin, 2009.

11 Nancy Adamson et coll., Feminist Organizing for Change: The Contemporary Women’s Movement in Canada, Toronto: Oxford University Press, 1988.

12 Constance Backhouse, « A Revolution in Numbers » dans Constance Backhouse et W. Wesley Pue, The Promise and Perils of Law, p. 265; annexe A, p. 289.

13 Constance Backhouse, « A Revolution in Numbers »; Abby Bushby et Josée Bouchard, présentation non publiée au Herstories Café, Toronto, 2013.

14 La liste complète des récipiendaires figure sur le site Web de la WLAO à l’adresse https://wlao.on.ca.